Cour d'appel de la cour martiale

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Date : 20030404

 

Dossier : CMAC-467

 

Référence neutre : 2003 CACM 5

 

 

CORAM : LE JUGE LÉTOURNEAU

LE JUGE DURAND

LE JUGE S. NOËL

 

 

 

ENTRE :

 

SOLDAT JEAN-GUY BARIL

 

appelant

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

 

 

Audience tenue à Montréal,(Québec) le 4 avril 2003.

 

Jugement livré à Montréal (Québec) le 4 avril 2003.

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE LÉTOURNEAU

 


 

Date : 20030404

 

Dossier : CMAC-467

 

Référence neutre : 2003 CACM 5

 

 

CORAM : LE JUGE LÉTOURNEAU

LE JUGE DURAND

LE JUGE S. NOËL

 

 

 

ENTRE :

 

SOLDAT JEAN-GUY BARIL

 

appelant

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l'audience à Montréal (Québec)

le 4 avril 2003.)

 

 

LE JUGE LÉTOURNEAU

 

[1]               L'accusé, qui occupait le rang de caporal au moment où il fut mis en accusation, a été trouvé coupable d'agression sexuelle, de séquestration et d'un acte préjudiciable au bon ordre et à la discipline militaire, cet acte consistant en du harcèlement à l'endroit de la plaignante.

 


[2]               Il a aussi plaidé coupable à une autre accusation de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline, cette dernière émanant d'un désordre provoqué par sa conduite après les incidents qui ont donné lieu aux trois chefs précédemment mentionnés. Cet appel ne remet pas en cause la condamnation pour cette infraction.

 

[3]               En conséquence de ce plaidoyer et de la déclaration de culpabilité par la Cour martiale permanente, trois autres chefs d'accusation furent retirés par la poursuite, soit un d'ivresse et deux de conduite méprisante à l'endroit d'un supérieur.

 

[4]               L'accusé a été condamné à une peine d'emprisonnement de 60 jours dont l'exécution fut suspendue. Il fut aussi rétrogradé au rang de soldat. Il en appelle des verdicts de culpabilité prononcés par la Cour martiale relativement à l'agression sexuelle, à la séquestration et au harcèlement.

 

[5]               L'appelant reproche au juge du procès quatre erreurs de droit :

a) d'avoir choisi entre la version de la plaignante et celle de l'appelant;

 

b) d'avoir appliqué une norme différente dans son évaluation des témoignages de la plaignante et de l'appelant;

 


c) d'avoir rejeté le témoignage de l'appelant en se fondant sur des conclusions qui ne sont pas supportées par la preuve; et

 

d) d'avoir omis de considérer l'ensemble de la preuve en escamotant les étapes 2 et 3 du test énoncé par la Cour suprême du Canada quant au bénéfice du doute raisonnable, lorsque la crédibilité de l'accusé s'oppose à celle de la plaignante : R. c. W. (D.), [1991] 1 R.C.S. 742.

 

[6]               Malgré les efforts louables de Me Lachance, nous sommes d'avis qu'aucun de ces reproches n'est fondé.

 

[7]               Le juge avait été alerté par les parties à la procédure dictée par cette décision de la Cour suprême ainsi qu'à la nécessité ultimement d'être convaincu hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé après une évaluation de toute la preuve admise au procès.

 

[8]               Il s'est dans un premier temps penché sur la déposition de l'accusé qu'il n'a pas cru, parce que la version de ce dernier avait été contredite :

a) soit par des témoins indépendants et crédibles (par exemple l'accusé a témoigné qu'il n'était pas en état d'ébriété alors que le caporal Bernier et le caporal Dalphond ont dit que l'accusé était en état d'ébriété avancé et titubait de temps en temps : voir les Dossiers d'appel, vol. 1, pp. 232, 249 et vol. 2, p. 161);


b) soit par la version de la plaignante corroborée par un témoin indépendant qui était un bon ami de l'accusé (par exemple l'accusé a dit que la plaignante lui a passé la main dans les cheveux alors que le sergent Castonguay a confirmé que l'accusé avait mis sa main autour de la taille de la plaignante et que celle-ci l'avait enlevée en repoussant les avances de l'accusé au motif qu'elle avait un ami de coeur : ibid. pp. 186, 188 et 189);

 

c) soit par l'état physique et émotif de la plaignante corroboré par le caporal Bernier (par exemple, l'accusé a prétendu que la plaignante était consentante alors que le caporal Bernier a trouvé cette dernière en pleurs dans l'escalier menant aux toilettes, est allé chercher de l'aide et, à son retour, a trouvé l'accusé dans l'entrée de la toilette des femmes où la plaignante se trouvait : ibid. pp. 158 à 160);

 

d) soit par le témoignage de la plaignante qui était compatible avec l'ensemble de la preuve.

 

[9]               À la page 311 du Dossier d'appel, le juge a ainsi conclu :

La Cour après avoir considéré l'ensemble de la preuve ne croit pas l'accusé en ce qui concerne sa version des événements quant aux gestes qu'il a posés au mess et les événements qui se sont produits dans le locker du gymnase.

 

 

 


[10]           Quant à la version de la plaignante qui était corroborée sur des points essentiels, il n'est pas

surprenant qu'il l'ait crue, son témoignage étant compatible avec l'ensemble de la preuve malgré

quelques contradictions et faiblesses que le juge a discutées dans son verdict et qu'il a jugées sans

impact véritable sur la crédibilité. Comme pour l'accusé, il a fait l'analyse de la crédibilité de la

plaignante en fonction de l'ensemble de la preuve.

 

[11]           La preuve a établi qu'à au moins trois reprises la plaignante a exprimé son refus de consentir

aux avances de l'accusé. Le juge n'a pas eu tort de conclure que, dans les circonstances, l'accusé a,

au mieux, fait montre d'une insouciance profonde ou d'un aveuglement volontaire à l'égard de ces

refus : voir la décision à la p. 315.

 

[12]           Sauf pour les gestes posés par l'accusé dans le placard du gymnase qui constituent le point

culminant de son comportement, la preuve à charge ne consistait pas simplement et uniquement en

deux versions contradictoires, soit celle de la plaignante et celle de l'accusé. D'autres témoins sont

venus appuyer les dires de la plaignante sur des aspects importants des accusations portées, renforçant

ainsi sa crédibilité. Le juge du procès a pris en considération l'ensemble des témoignages qu'il a

entendus. Après en avoir apprécié la valeur probante, il s'est déclaré convaincu hors de tout doute

raisonnable de la culpabilité de l'accusé. Il a eu le bénéfice de voir et d'entendre les témoins, don't

l'accusé. À moins d'une erreur qui justifierait notre intervention, ce que l'appelant n'a pas réussi à

établir, nous ne pouvons substituer notre appréciation de la preuve à celle du juge du procès.

 

[13]           Pour ces motifs l'appel sera rejeté.

 

 

 

« Gilles Létourneau »

J.C.A.

 

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