Cour d'appel de la cour martiale

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Date : 20210611


Dossiers : CMAC-606

CMAC-607

CMAC-608

CMAC-609

Référence : 2021 CACM 2

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE EN CHEF BELL

LE JUGE RENNIE

LA JUGE PARDU

 

CMAC-606

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

MATELOT DE PREMIÈRE CLASSE C.D. EDWARDS

intimé

CMAC-607

ET ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

CAPITAINE C.M.C. CRÉPEAU

intimée

CMAC-608

ET ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

ARTILLEUR K. FONTAINE

intimé

CMAC-609

ET ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

CAPITAINE M.J. IREDALE

intimé

Audience tenue en personne à Ottawa (Ontario) et par vidéoconférence

organisée par le greffe, le 29 janvier 2021.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario) le 11 juin 2021.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA COUR

 


Date : 20210611


Dossiers : CMAC-606

CMAC-607

CMAC-608

CMAC-609

Référence : 2021 CACM 2

CORAM :

LE JUGE EN CHEF BELL

LE JUGE RENNIE

LA JUGE PARDU

 

 

CMAC-606

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

MATELOT DE PREMIÈRE CLASSE C.D. EDWARDS

intimé

CMAC-607

ET ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

CAPITAINE C.M.C. CRÉPEAU

intimée

CMAC-608

ET ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

ARTILLEUR K. FONTAINE

intimé

CMAC-609

ET ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

CAPITAINE M.J. IREDALE

intimé

MOTIFS DU JUGEMENT

LA COUR

I. Aperçu

[1] Dans une série de décisions de la cour martiale, des juges militaires ont affirmé qu’ils ne jouissaient pas de l’indépendance institutionnelle. En conséquence, ils ont conclu à une atteinte au droit des inculpés qui comparaissent devant eux à un procès devant un tribunal indépendant et impartial, garanti par l’alinéa 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, édictée comme l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11(R.-U.).

[2] Ces décisions de première instance soulèvent un même thème : la possibilité de poursuite d’un juge militaire pour une infraction sous le régime de la Loi sur la défense nationale, L.R.C. (1985), ch. N-5 (la Loi) rend ce dernier vulnérable à des poursuites coercitives ou intentées en représailles par une personne mécontente de l’issue de sa propre affaire. Il s’ensuit que les juges militaires doivent être à l’abri des poursuites en droit militaire pendant leur mandat. Si la question est libellée différemment dans les affaires dont il est interjeté appel, chacune trouve sa source dans la décision du juge militaire Pelletier dans l’affaire Her Majesty the Queen v. Master Corporal K.G. Pett, 2020 CM 4002 [Pett].

[3] Dans l’affaire Pett, l’accusé soutenait que l’ordre donné par le chef d’état-major de la défense le 2 octobre 2019 (l’ordre contesté) quant à la désignation d’un commandant chargé d’examiner les questions de discipline militaire applicable aux juges militaires était inopérant. Le caporal-chef Pett affirmait que l’ordre contesté portait atteinte à son droit à un procès devant un tribunal indépendant et impartial garanti par l’alinéa 11(d) de la Charte. L’ordre contesté est ainsi rédigé en partie :

[traduction]

1. Moi, J. H. Vance, chef d’état-major de la défense nommé au titre du paragraphe 18(1) de la Loi sur la défense nationale, conformément à la définition du terme “commandant” prévue à l’article 1.02 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes, par les présentes :

a) révoque l’ordre donné le 19 janvier 2018 quant à la désignation à l’égard de la présente unité;

b) désigne l’officier nommé au poste de vice-chef d’état-major adjoint de la défense (VCEMAD) et qui a un grade qui n’est pas inférieur à major-général ou à contre-amiral à titre de commandant chargé d’exercer les pouvoirs relatifs aux affaires disciplinaires relatives aux juges militaires par l’entremise du Cabinet du juge militaire en chef;

[…]

2. Le VCEMAD, quand il agit à titre de commandant mentionné à l’alinéa b), en matière disciplinaire, relève du vice-chef d’état-major de la défense (VCEMD) […]

[4] La Couronne interjette appel du sursis ordonné dans les affaires dont la Cour est saisie. La principale question que soulèvent les appels est celle de savoir si le rôle d’un juge militaire [traduction] « compte tenu du droit garanti par la Charte à un procès devant un tribunal indépendant » est incompatible avec le rôle d’un officier dans les Forces armées canadiennes. Autrement dit, l’application du Code de discipline militaire aux juges militaires mènerait-elle « une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique » à conclure à une crainte de partialité? (Committee for Justice and Liberty c. L’Office national de l’énergie, [1978] 1 R.C.S. 369, p. 394, 1976 CanLII 2 [Committee for Justice and Liberty]).

[5] Pour les motifs qui suivent, nous accueillons les appels, nous annulons les ordonnances de sursis, nous rejettons l’appel incident interjeté dans l’affaire Capitaine C.M.C. Crépeau c. Sa Majesté la Reine, 2020 CACM 607 et nous ordonnons la tenue d’un procès dans chacune des affaires.

[6] En guise d’aperçu, nous concluons que les décisions dont il est interjeté appel sont viciées par deux erreurs de droit.

[7] Les affirmations des juges militaires dans les décisions dont il est fait appel sont fondamentalement incompatibles avec les précédents bien établis, et récemment confirmés, de la Cour suprême du Canada et n’y sont pas conformes. La Cour suprême a reconnu le rôle particulier et double du système de justice militaire. La thèse qui fonde les décisions en litige – selon laquelle l’on ne saurait être à la fois juge militaire et officier – ne cadre tout simplement pas avec les précédents faisant autorité. En outre, si elle était correcte, elle irait à l’encontre de l’objet même du système de justice militaire. Voir R. c. Généreux, [1992] 1 R.C.S. 259, 1992 CanLII 117 [Généreux]; R. c. MacKay, [1980] 2 R.C.S. 370, 1980 CanLII 217 [MacKay]; R. c. Cawthorne, 2016 CSC 32, [2016] 1 R.C.S. 983 [Cawthorne]; R c. Stillman, 2019 CSC 40 [Stillman]; R. c. Royes, 2016 CACM 1 [Royes], autorisation de pourvoi refusée, 37054 (2 septembre 2016); Beaudry c. La Reine 2018 CACM 4 [Beaudry].

[8] Le système de justice militaire a été créé dans un certain but, c’est-à-dire favoriser la discipline, l’efficacité et le moral au sein des Forces armées canadiennes. Le Canada exige une force opérationnelle prête à défendre les intérêts du pays, et sa population s’attend à une telle force. Ce système prévoit également des cours martiales opérationnelles et itinérantes, qui comptent sur les juges militaires pour respecter le Code de discipline militaire et s’y conformer pendant leur mandat.

[9] La deuxième erreur concerne l’application du critère de la personne bien renseignée. Cette personne, qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, conclurait-elle que l’indépendance institutionnelle des cours martiales est compromise? Les juges militaires n’ont pas tenu compte du contexte ou de l’objet du système de justice militaire, n’ont pas examiné la question « de façon réaliste et pratique », comme l’exige la Cour suprême, et ont fait fi des considérations contextuelles qui protègent l’indépendance et l’impartialité des juges militaires.

[10] Il ressort d’un examen de l’ordre contesté effectué, comme il se doit, à la lumière du contexte élargi, qu’aucune personne bien renseignée ne conclurait à une crainte de partialité ou à l’indépendance compromise des cours martiales. En analysant l’ordre isolément, sans tenir compte des garanties conventionnelles et juridiques d’indépendance et d’impartialité, les juges des cours martiales ont fait fi des directives énoncées par la Cour suprême du Canada.

II. Réponses à l’ordonnance en litige

A. Pett

[11] Dans l’affaire Pett, l’inculpé était accusé de s’être conduit de façon méprisante envers un supérieur et de mauvais traitements à un subalterne, des infractions prévues aux articles 85 et 95, respectivement, de la Loi. L’inculpé affirmait que l’ordre contesté portait atteinte à son droit, garanti par l’alinéa 11d) de la Charte, de comparaître devant un tribunal indépendant et impartial. Ayant conclu que la Loi prévoit que le Code de discipline militaire s’applique aux juges militaires, le juge militaire Pelletier a examiné le cadre légal conçu pour assurer l’indépendance et l’impartialité judiciaire.

[12] Le juge militaire Pelletier a conclu que l’ordre contesté portait atteinte aux droits que l’alinéa 11d) de la Charte garantit à l’inculpé et a déclaré qu’il était [traduction] « inopérant en ce qui a trait aux paragraphes 1b) et 2, applicables à toute question disciplinaire dont est saisi un juge militaire ».

[13] Le juge militaire Pelletier a tenu compte des facteurs suivants qui militent en faveur de l’indépendance et de l’impartialité des juges militaires, et ce même s’il estimait que ces facteurs ne permettaient pas de satisfaire à la norme constitutionnelle :

  • a) Le mandat d’un juge militaire peut seulement faire l’objet d’une révocation motivée (par. 165.21(3) de la Loi) sur recommandation du comité d’enquête sur les juges militaires adressée au gouverneur en conseil. Ainsi, leur inamovibilité est assurée;

  • b) Le juge militaire bénéficie de la même immunité de poursuite qu’un juge d’une cour supérieure de juridiction criminelle (art. 165.231 de la Loi);

  • c) Seul le juge militaire en chef peut confier à un juge militaire des fonctions, et ces dernières ne doivent pas être incompatibles avec ses fonctions judiciaires (art. 165.23(2) de la Loi);

  • d) Les juges militaires bénéficient d’un régime de rémunération distinct (art. 165.33 de la Loi et chapitre 204 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (ORRFC), et leur rémunération, y compris leur traitement et les autres avantages, est déterminée par le comité d’examen de la rémunération des juges militaires, qui présente un rapport tous les quatre ans;

  • e) Aux termes des paragraphes 165.21(3) à (5) de la Loi, un juge militaire cesse d’occuper sa charge par suite d’une révocation motivée, dès qu’il est, à sa demande, libéré ou qu’il atteint 60 ans ou démissionne en avisant par écrit le ministre.

  • f) Le juge militaire ne peut être retiré du rang de ses fonctions militaires (art. 19.75 des ORRFC);

  • g) Les juges militaires disposent d’un régime de grief distinct (par. 29(2.1) de la Loi);

  • h) Aucun rapport ou appréciation personnel ne doit être rempli à l’égard d’un juge militaire s’il sert en tout ou en partie à décider si l’officier a les qualifications pour être promu ou à prévoir la formation, l’affectation ou le taux de solde (chapitres 26.10 et 26.12 des ORRFC).

[14] Plus loin dans ses motifs, le juge militaire Pelletier renvoie également à l’article 179 de la Loi, qui confie aux juges militaires, en partie, « les mêmes attributions qu’une cour supérieure de juridction criminelle [pour les] autres questions relevant de sa compétence ».

[15] Nous signalons que le juge militaire Pelletier n’a pas énuméré le serment que doit prêter le juge militaire parmi les facteurs qui militent en faveur d’une conclusion d’indépendance et d’impartialité. Ce serment, prévu au paragraphe 165.21(2) de la Loi, est ainsi libellé :

Serment

Oath

(2) Avant d’entrer en fonctions, le juge militaire prête le serment suivant : Moi, ____________, je promets et jure (ou j’affirme solennellement) que j’exercerai fidèlement, sans partialité et de mon mieux les attributions qui me sont dévolues en ma qualité de juge militaire. (Dans le cas du serment, ajouter : Ainsi Dieu me soit en aide.)

(2) Every military judge shall, before commencing the duties of office, take the following oath of office: I _________, solemnly and sincerely promise and swear (or affirm) that I will impartially, honestly and faithfully, and to the best of my skill and knowledge, execute the powers and trusts reposed in me as a military judge. (And in the case of an oath: So help me God.)

[16] Fait important, le juge militaire Pelletier conclut qu’un juge militaire ne saurait être traité de la même manière qu’un autre officier en matière de discipline, car un tel traitement nuirait à l’impartialité judiciaire. En outre, il conclut que le comité d’enquête constitué sous le régime des articles 165.31 à 165.32 de la Loi évacue le rôle du pouvoir exécutif (parfois « chaîne de commandement » ci-après) en ce qui a trait à la discipline des juges militaires. À cet égard, le juge militaire Pelletier opine en ces termes [traduction] « […] l’ordre contesté, en visant les juges militaires en particulier, impose un système disciplinaire sans égard à celui préconisé par le législateur. Ce fait, en soi, enfreint le principe d’impartialité judiciaire » (Pett, par. 116). Le système auquel il renvoie est celui qui prévoit la constitution d’un comité d’enquête.

[17] Selon le juge militaire Pelletier, les juges militaires, tant qu’ils sont juges, sont soustraits à l’application du Code de discipline militaire. Or, il admet que les anciens juges militaires peuvent être accusés d’une infraction au Code de discipline militaire une fois qu’ils ont pris leur retraite, qu’ils ont été libérés à leur demande ou que leur mandat est révoqué par suite d’une enquête tenue par le comité d’enquête sur les juges militaires.

[18] Même s’il conclut que l’ordre contesté enfreint la Charte, le juge militaire Pelletier n’accorde pas la deuxième réparation sollicitée par le caporal-chef Pett, soit le sursis. En rejetant la requête en sursis, le juge militaire Pelletier conclut que la déclaration d’invalidité, à la lumière d’autres remarques à propos de l’application limitée du Code de discipline militaire aux juges militaires, veille à ce que [traduction] « nul observateur raisonnable et bien renseigné ne croirait » que le juge militaire est indépendant et impartial.

B. R. v. D’Amico

[19] La juge militaire Sukstorf, dans l’affaire R. v. D’Amico 2020 CM 2002 [D’Amico] postérieure à l’affaire Pett, examine un argument constitutionnel semblable. Elle décrit la question en ces termes :

[traduction]

Le cœur de la question dont la Cour est saisie est non pas celle de savoir si les rôles doubles d’officier et de juge militaire sont incompatibles, car le législateur et la Cour suprême du Canada (CSC) dans l’arrêt R. c. Généreux, [1992] 1 R.C.S. 259, reconnaissent le rôle des juges militaires à titre de juges et d’officiers en service. La question dont la Cour est saisie est plutôt de savoir ce qui constitue le degré permis de lien entre la chaîne de commandement militaire et ses juges qui garantit que chaque inculpé qui comparaît devant une cour martiale se présente devant un tribunal indépendant et impartial, comme l’exige l’alinéa 11d) de la Charte

[par. 7]

[20] Fait important, la juge militaire Sukstorf soulève notamment la question suivante : le juge militaire Pelletier va-t-il trop loin lorsqu’il conclut que les juges militaires ne sont pas assujettis au Code de discipline militaire pendant leur mandat?

[21] Dans une décision un peu nuancée, car elle porte sur l’application extraterritoriale du Code de discipline militaire, la juge militaire Sukstorf, suivant le principe de la courtoisie, semble souscrire à [traduction] « l’approche pragmatique » du juge militaire Pelletier selon laquelle les tribunaux civils et les comités d’enquête sont les mieux placés pour traiter les infractions commises par des juges militaires.

[22] Après les décisions Pett et D’Amico, le chef d’état-major de la défense n’a pas modifié l’ordre contesté. Par conséquent, les juges militaires ont changé leur fusil d’épaule. Certains ont mis de côté la retenue exprimée dans les décisions Pett et D’Amico pour ce qui est des réparations. En plus de déclarer inopérant l’ordre contesté, les juges militaires Pelletier et d’Auteuil se sont mis à ordonner des sursis. Ces sursis ont donné lieu, en partie, aux appels en l’espèce.

C. R. v. Edwards, R. v. Crépeau, R. v. Fontaine, R. v. Iredale

[23] Le matelot de première classe Edwards a été accusé de comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline, une infraction prévue à l’article 129 de la Loi, pour consommation de cocaïne, interdite à l’article 20.04 des ORRFC. Dans le cadre d’une requête préalable au procès dans l’affaire R. v. Edwards, 2020 CM 3006 [Edwards], le juge miliaire d’Auteuil conclut que l’ordre contesté porte atteinte au droit de l’inculpé à un procès devant un tribunal indépendant et impartial garanti par l’alinéa 11d) de la Charte. Il ordonne le sursis à titre de réparation en vertu du paragraphe 24(1) de la Charte.

[24] Selon le juge militaire d’Auteuil, un observateur raisonnable et bien renseigné conclurait que l’ordre contesté vise à faire tomber les juges militaires sous le coup du régime disciplinaire conçu pour les infractions d’ordre militaire, et ce malgré la disposition de la Loi qui, selon lui, confie au comité d’enquête le pouvoir exclusif d’examiner les comportements des juges militaires. Il ordonne le sursis.

[25] Le juge militaire d’Auteuil rend, le même jour que sa décision dans l’affaire Edwards, une décision semblable dans l’affaire R. v. Crépeau, 2020 CM 3007 [Crépeau]. Dans cette affaire, il ordonne le sursis en raison d’une perception quant au manque d’indépendance des cours militaires (par. 83). Il ordonne également le sursis, pour les mêmes motifs, dans l’affaire R. v. Fontaine, 2020 CM 3008 [Fontaine]. Son collègue, le juge militaire Pelletier ordonne également le sursis dans l’affaire R. v. Iredale, 2020 CM 4011 [Iredale]. Il est d’avis que le sursis est la seule réparation adéquate, compte tenu du fait que le chef d’état-major de la défense n’a pas révoqué l’ordre contesté. Nous signalons que la révocation a été sollicitée dans les affaires Pett, au paragraphe 146, et D’Amico, au paragraphe 28. L’avis du juge militaire Pelletier est énoncé on ne peut plus clairement dans ses motifs dans l’affaire Iredale, la dernière faisant l’objet des appels devant la Cour :

[traduction]

Mon avis, suivant lequel un juge militaire ne saurait comparaître devant une cour martiale tant que dure son mandat, demeure. Je suis également d’avis qu’un officier qui a abandonné sa charge judiciaire ou l’a vu révoquée par suite d’une décision du comité d’enquête sur les juges militaires peut être appelé à comparaître devant une cour martiale sans crainte pour l’indépendance et l’impartialité judiciaire, puisqu’il n’est plus juge.

[Iredale, par. 37]

[26] Le 18 août 2020, le directeur adjoint des poursuites militaires a déposé un avis d’appel dans l’affaire Edwards. Des avis d’appel ont été déposés par la suite dans les affaires Crépeau, Fontaine et Iredale. Le 26 septembre 2020, l’avocat de la capitaine Crépeau a déposé un appel incident au motif que la décision du juge militaire, suivant laquelle les articles 12, 18 et 60 de la Loi étaient constitutionnels, était erronée.

III. Questions pertinentes dans les appels

[27] À la date de la décision rendue par le juge militaire Pelletier dans l’affaire Iredale, l’ordre contesté n’avait pas été révoqué. Dans le dossier Crépeau, l’intimé interjette un appel incident au motif que les articles 12, 18 et 60 de la Loi sont inconstitutionnels dans leur intégrité. Selon lui, ces dispositions portent également atteinte à son droit à un procès devant un tribunal indépendant et impartial garanti par l’alinéa 11d) de la Charte, car elles s’appliquent aux membres des Forces armées canadiennes, dont les juges militaires, qui sont également des officiers.

[28] Les questions que soulèvent les présents appels sont les suivantes :

  1. L’ordre contesté enfreint-il l’alinéa 11d) de la Charte?
  2. Les articles 12, 18 et 60 de la Loi enfreignent-ils l’alinéa 11d) de la Charte?

[29] L’importance de ces questions, tout particulièrement la première, ressort clairement de la thèse formulée par le juge militaire Pelletier dans l’affaire Iredale en ces termes :

[traduction]

Aux motifs que j’ai rédigés dans l’affaire Pett viennent s’ajouter ceux de mes collègues, les juges militaires d’Auteuil et Sukstorf. Par exemple, je souscris volontiers à l’énoncé formulé au paragraphe 54 de la décision Edwards, suivant lequel la perception de conflit découlant du rôle et de la situation du juge militaire à titre d’officier exerçant des fonctions relevant à la fois du pouvoir judiciaire et du pouvoir exécutif peut être résolue si l’on considère la nomination d’un juge militaire par le gouverneur en conseil comme la mutation d’un officier de l’organe exécutif à l’organe judiciaire du gouvernement. Cette manière de voir les choses est conforme à la conclusion énoncée dans l’affaire Pett suivant laquelle un juge militaire ne saurait être accusé d’une infraction au CDM tant qu’il siège à titre de juge militaire. [par. 34]

[…]

Ma conclusion, selon laquelle un juge militaire ne devrait jamais comparaître devant une cour martiale pendant la durée de son mandat, demeure inchangée. Je suis également toujours d’avis qu’un officier qui a renoncé à sa charge ou en a été privé par une décision du comité d’enquête sur les juges militaires pourrait comparaître devant une cour martiale sans égard pour l’indépendance et l’impartialité judiciaires, puisqu’il n’est plus juge. Bien entendu, il peut se révéler ardu de faire la distinction entre le comportement de l’officier et celui du juge militaire dans de telles circonstances. Cependant, il vaut mieux laisser à une cour de justice le soin d’examiner cette question dans le cadre d’un procès. [Par. 37]

IV. Lois, règlements et politiques pertinentes

[30] Les dispositions des lois, règlements et politiques qui s’appliquent à l’espèce sont reproduites à l’annexe A, sauf pour ce qui est de certaines, qui sont reproduites dans le texte des présents motifs de jugement.

V. Analyse

A. Thèse de l’appelante

[31] L’appelante affirme que les juges militaires sont assujettis au Code de discipline militaire. Le paragraphe 60(2) de la Loi dispose que « [q]uiconque était justiciable du code de discipline militaire au moment où il aurait commis une infraction d’ordre militaire peut être accusé, poursuivi et jugé pour cette infraction sous le régime du code de discipline militaire […] ». La seule restriction à ce principe est énoncée au paragraphe 164(1.3), suivant lequel les juges militaires ne peuvent être jugés sommairement.

[32] Selon l’appelante, le législateur, en termes exprès, entendait confier à des officiers des fonctions judiciaires. Elle mentionne plusieurs mesures conçues pour protéger les juges militaires des conflits éventuels. Il s’agit notamment des mesures énumérées aux paragraphes 9 à 11 des présents motifs.

[33] L’appelante soutient que le comité d’enquête ne constitue pas un organe disciplinaire et que le juge d’Auteuil a commis une erreur dans l’affaire Edwards en affirmant que le comité d’enquête remplace la cour martiale à l’égard d’une infraction d’ordre militaire. Selon elle, l’application du Code de discipline militaire aux juges militaires ne diffère aucunement de l’application du Code criminel ou d’une autre loi provinciale ou fédérale à un juge civil. La conclusion quant à la prétendue infraction à l’alinéa 11d) de la Charte découle d’une présomption déplacée suivant laquelle les acteurs au sein du système de justice militaire agiront inadéquatement, illégalement ou de mauvaise foi. Cette présomption est contraire à celle voulant que les acteurs qui agissent sous le régime d’une loi soient de bonne foi (Cawthorne) et que des mesures aient été mises en place pour prévenir les actes répréhensibles.

[34] Selon l’appelante, l’ordre contesté ne place pas les juges militaires dans une nouvelle structure de commandement. Il offre simplement le mécanisme nécessaire pour le traitement des accusations et pour une analyse complète de l’intérêt public.

B. Thèse des intimés – Edwards et Iredale

[35] Les intimés ont présenté deux mémoires : le premier concerne les affaires Edwards et Iredale et le second, les affaires Crépeau et Fontaine.

[36] Les intimés dans les affaires Edwards et Iredale soutiennent que l’ordre contesté mènerait une personne raisonnable et bien renseignée à conclure que l’organe exécutif présume être habilité à discipliner les juges militaires, à titre de juges militaires, et qu’une telle ingérence dans l’indépendance judiciaire ne saurait être tolérée. Faisant valoir les motifs du juge militaire d’Auteuil dans la décision Edwards, les intimés Edwards et Iredale affirment que les juges militaires, au moment de leur nomination, sont mutés de l’organe exécutif à l’organe judiciaire et ne relèvent à nouveau de l’organe exécutif qu’à la cessation de leurs fonctions.

[37] En outre, selon les intimés, la présomption avancée par l’appelante – selon laquelle les acteurs agissant sous le régime d’une loi exercent leurs pouvoirs de bonne foi – ne protège pas suffisamment l’indépendance judiciaire. Cette dernière ne saurait dépendre de la bonne foi des acteurs. Ils citent les motifs de la juge militaire Sukstorf dans la décision D’Amico, aux paragraphes 46 à 47, reproduits ci-après :

[traduction]

[…] il est impératif de démontrer à tous les membres des FAC en service que les juges militaires peuvent trancher leurs affaires indépendamment de la poursuite et de la chaîne de commandement et le font effectivement.

[…]

Il importe que l’inculpé sache que le juge militaire qui entendra l’affaire est véritablement indépendant et n’est assujetti à aucune ingérence de la part de la chaîne de commandement. [...]

[38] Les intimés invoquent l’arrêt R. c. Lippé, [1991] 2 R.C.S. 114, p. 138, 1990 CanLII 18 [Lippé], dans lequel la Cour suprême du Canada estime que le Barreau du Québec n’est pas habilité à sanctionner les juges municipaux, car il en découlerait une crainte de manque d’indépendance de la part des cours municipales. Selon eux, le comité d’enquête est chargé d’assurer la discipline des juges militaires. À leur avis, assujettir les juges militaires au Code de discipline militaire serait contraire à l’intention du législateur.

C. Thèse des intimés - Crépeau et Fontaine

[39] Dans une réponse distincte, la capitaine Crépeau et l’artilleur Fontaine affirment que la Cour a déjà examiné les principes d’indépendance et d’impartialité, et ce dans les arrêts R. c. Lauzon, 1998 CACM 415, et R. c. Leblanc, 2011 CACM 2. Ils prétendent que la Cour, dans ces deux affaires, a confirmé le caractère essentiel de l’indépendance judiciaire et de l’impartialité pour assurer la confiance de l’inculpé et du public dans le système de justice militaire. Selon eux, la question fondamentale concerne l’équité du procès.

[40] Quant à la question de savoir si les juges militaires devraient être traités comme tous ceux qui sont assujettis au Code de discipline militaire, les intimés Crépeau et Fontaine affirment qu’il ne peut y avoir de compromis en la matière. L’ingérence du pouvoir exécutif dans le processus disciplinaire ne doit jamais servir à faire pression sur les juges militaires. L’indépendance et l’impartialité institutionnelles requièrent que ces derniers soient à l’abri des pressions externes, y compris de l’ingérence possible de la chaîne de commandement, par l’application du Code de discipline militaire.

[41] Les intimés sont tous d’accord, à mauvais droit selon nous, avec les juges militaires pour dire qu’il appartient au comité d’enquête de faire respecter le Code de discipline militaire à l’égard des juges militaires. Particulièrement, les intimés invoquent la poursuite du juge militaire en chef Dutil (Canada (Directeur des poursuites militaires) c. Canada (Cabinet du juge militaire en chef), 2020 CF 330) à l’appui de leur affirmation selon laquelle la hiérarchie militaire rechigne à mettre en œuvre les recommandations du comité d’enquête. L’ancien juge militaire en chef Dutil avait été visé par une plainte déposée auprès du comité d’enquête, qui l’a rejetée. Toutefois, environ trois ans après le rejet de la plainte, de nouveaux éléments de preuve ont mené le directeur des poursuites militaires à déposer des accusations contre le juge militaire en chef Dutil pour infractions au Code de discipline militaire, notamment en matière de fraude. Le comité d’enquête n’avait pas été saisi d’une plainte concernant la fraude.

D. Aperçu du système de justice militaire

[42] L’arrêt Généreux est l’arrêt de principe ayant défini les paramètres actuels relatifs à l’indépendance des juges militaires. La Cour suprême dans cet arrêt renvoie à l’arrêt MacKay, rendu avant l’adoption de la Charte et portant sur le droit de l’inculpé à un tribunal impartial et indépendant. Dans l’arrêt Généreux, le juge en chef Lamer opine en ces termes :

Le but d’un système de tribunaux militaires distinct est de permettre aux Forces armées de s’occuper des questions qui touchent directement à la discipline, à l’efficacité et au moral des troupes. La sécurité et le bien‑être des Canadiens dépendent dans une large mesure de la volonté d’une armée, composée de femmes et d’hommes, de défendre le pays contre toute attaque et de leur empressement à le faire. Pour que les Forces armées soient prêtes à intervenir, les autorités militaires doivent être en mesure de faire respecter la discipline interne de manière efficace. Les manquements à la discipline militaire doivent être réprimés promptement et, dans bien des cas, punis plus durement que si les mêmes actes avaient été accomplis par un civil. Il s’ensuit que les Forces armées ont leur propre code de discipline militaire qui leur permet de répondre à leurs besoins particuliers en matière disciplinaire. En outre, des tribunaux militaires spéciaux, plutôt que les tribunaux ordinaires, se sont vu conférer le pouvoir de sanctionner les manquements au Code de discipline militaire. Le recours aux tribunaux criminels ordinaires, en règle générale, serait insuffisant pour satisfaire aux besoins particuliers des Forces armées sur le plan de la discipline. Il est donc nécessaire d’établir des tribunaux distincts chargés de faire respecter les normes spéciales de la discipline militaire.

[Généreux, par. 60.]

[43] La conclusion du juge Lamer tire son origine de la Loi. L’un des principes de détermination de la peine prévu à l’article 203.1 est défini ainsi « favoriser l’efficacité opérationnelle des Forces canadiennes en contribuant au maintien de la discipline, de la bonne organisation et du moral ».

[44] Pour des raisons évidentes, le système civil de justice criminelle n’a pas comme principe de détermination de la peine l’efficacité opérationnelle des Forces armées canadiennes. Deuxièmement, le système civil de justice criminelle est rarement appelé à traiter ses propres employés. Cela étant dit, les fonctionnaires, notamment les policiers et les poursuivants, voire les juges, peuvent être justiciables du système civil de justice criminelle.

[45] La justice militaire, sous toutes ses formes, favorise la discipline, l’efficacité et le moral au sein des Forces canadiennes dans le but d’assurer une force opérationnelle et efficace peu importe où elle est déployée dans le monde. Cette conception de la mission et déclaration d’objet est étrangère au système civil de justice criminelle.

[46] Dans l’arrêt Cawthorne, la Cour suprême examine un argument semblable, mais distinct. Cette affaire soulève la question de savoir si le pouvoir du ministre de la Défense nationale d’interjeter appel d’une décision d’une cour martiale ou d’un arrêt de la Cour d’appel de la cour martiale contrevient à l’article 7 et à l’alinéa 11d) de la Charte. La Cour rejette l’argument des intimés fondé sur l’alinéa 11d) (par. 32). Quant à l’argument fondé sur l’article 7, les intimés soutiennent que « le ministre est un membre du Cabinet qui n’est pas lié par les conventions d’indépendance applicables au procureur général, et que le rôle ‘quasi judiciaire’ du ministre est incompatible avec les fonctions de contrôle et d’administration qu’il exerce à l’égard des Forces armées canadiennes » (par. 31). La Cour rejette également cet argument et signale ces faits :

À l’instar du procureur général ou des autres fonctionnaires exerçant une fonction de poursuivant, le ministre a droit au bénéfice d’une forte présomption qu’il exerce son pouvoir discrétionnaire en matière de poursuites indépendamment de toute considération partisane. Le simple fait que le ministre est membre du Cabinet n’écarte pas cette présomption. En effet, la loi présume que le procureur général — lui aussi membre du Cabinet — peut faire abstraction des obligations partisanes et en fait abstraction dans l’exercice de ses responsabilités de poursuivant. Il n’y a aucune raison impérieuse de traiter le ministre différemment à cet égard.

[Cawthorne, par. 32]

[47] Les dernières conclusions énoncées par la Cour suprême sur la conformité à la Charte du système de justice militaire, dans l’arrêt Stillman, ne portent pas sur le droit protégé par l’alinéa 11d) à un tribunal indépendant et impartial. Toutefois, les juges majoritaires mentionnent des mesures de réforme importantes, dont l’adoption du projet de loi C-25 en 1998, sous le régime duquel un « cadre législatif a été établi pour assurer l’indépendance des juges militaires par l’adoption de dispositions concernant la durée de leur mandat, leur rémunération et leur révocation, laquelle est désormais possible uniquement sur recommandation d’un comité d’enquête », ce dernier point constituant un renvoi à la procédure du comité d’enquête (Stillman, par. 48). Les juges Moldaver et Brown, au nom des juges majoritaires, citent des extraits de l’Ébauche – Rapport interne – Révision globale de la cour martiale du 17 janvier 2018 (le rapport provisoire issu de la RGCM) suivant laquelle la justice militaire peut dorénavant compter sur des « institutions et des mécanismes favorisant l’indépendance des intervenants au sein du système; ce dernier a ainsi été en grande partie harmonisé avec le système [civil] de justice pénale du Canada, tout en préservant de nombreux aspects historiques propres aux cours martiales, comme la participation d’un comité de militaires qui agit à titre de juge des faits » (Stillman, par. 48).

[48] Ce qui précède concerne la jurisprudence récente issue de la Cour suprême sur l’indépendance des cours martiales. Ce qui suit constitue un résumé de la structure du système de justice militaire dans son ensemble. Ce système fonctionne différemment du système civil de justice criminelle, ce qui est à la fois intentionnel et nécessaire.

[49] Le système de justice militaire est constitué de deux voies : les procès sommaires et les procès devant une cour martiale. Les sections 5 et 6 de la Loi instituent chacune. Les ORRFC énoncent la procédure d’instruction d’une accusation applicable à chacune au volume II – Discipline, aux chapitres 108 et 111.

[50] Les procès sommaires constituent la voie la plus courante et servent à instruire les affaires relatives à des infractions mineures susceptibles d’être entendues par des membres de la chaîne de commandement, au sein de l’unité. L’officier qui préside le procès sommaire, lui-même assujetti au Code de discipline militaire, tient lieu de juge. Fait important, ces officiers qui président les procès sommaires ne sont ni avocats ni juges. Dans le cadre d’un procès sommaire, l’inculpé n’est pas représenté par un avocat, mais il peut compter sur un officier désigné pour l’aider à préparer sa défense ainsi qu’après le procès s’il veut demander la révision de la décision.

[51] Dans le cadre d’un procès sommaire, les pouvoirs en matière de sanction sont limités, les infractions étant relativement mineures. Le membre des Forces armées canadiennes déclaré coupable d’une infraction d’ordre militaire par voie de procès sommaire a le droit de demander la révision de la décision, de la peine ou des deux. L’autorité de révision effectue la révision à la demande du membre ou de son propre chef. Elle est constituée d’un officier qui a un grade supérieur à celui qui a présidé le procès sommaire. Elle peut annuler le verdict, substituer un nouveau verdict de culpabilité au verdict de culpabilité ou réduire, remettre ou commuer les peines imposées à l’issue d’un procès sommaire (ORRFC, art. 108.45). La décision de l’autorité de révision peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire par la Cour fédérale.

[52] En revanche, les cours martiales, des cours militaires formelles, connaissent des infractions graves. La cour martiale peut infliger une peine d’emprisonnement, notamment à perpétuité. La cour martiale a une procédure et des règles semblables à celles d’une cour civile de juridiction criminelle et a les mêmes attributions qu’une cour supérieure de juridiction criminelle (Loi, art. 165.231 et 179).

[53] Les cours martiales ont deux formes : la cour martiale générale et la cour martiale permanente. La cour martiale générale est constituée d’un juge militaire et d’une formation de cinq membres des Forces armées canadiennes assujettis au Code de discipline militaire. Cette formation constitue le juge des faits et prononce le verdict. Le juge militaire donne des instructions à la formation tout comme le juge d’une cour supérieure provinciale ou territoriale donne des instructions au jury. Le juge militaire tranche les questions de droit en cours de procès et détermine la peine en cas de verdict de culpabilité.

[54] La cour martiale permanente est constituée d’un juge siégeant seul à titre de juge des faits et du droit. Il décide si l’inculpé est coupable ou non et, dans le premier cas, détermine la peine. Au procès devant la cour martiale permanente, le directeur des poursuites militaires est chargé de la poursuite. L’inculpé a le droit d’être représenté par un avocat désigné par le directeur du Service d’avocats de la défense ou par un avocat civil.

[55] Aux termes de l’article 230 de la Loi, les appels interjetés des décisions des cours martiales sont entendus par notre Cour. Un appel subséquent peut être interjeté auprès de la Cour suprême du Canada, en vertu du paragraphe 245(1).

[56] Les cours martiales sont présidées par des juges militaires dotés d’une formation juridique formelle et d’expérience. Les procès sommaires ne portent pas sur des infractions graves; les cours martiales ne connaissent pas d’infractions mineures. Cependant, l’accusé peut opter pour un procès sommaire ou par une cour martiale à l’égard de nombres infractions. Aux termes de l’article 162.1 de la Loi, sauf dans certaines circonstances, l’accusé qui peut être jugé sommairement a le droit d’opter pour une cour martiale.

E. Sous réserve de la présente contestation constitutionnelle, les juges militaires sont justiciables de la cour martiale pour infraction au Code de discipline militaire pendant leur mandat

[57] Le Code de discipline militaire est la pierre angulaire du système de justice militaire. Il établit les normes de conduite des membres des Forces armées canadiennes, y compris des juges militaires, essentielles au maintien de la discipline, de l’efficacité et du moral. Le succès de la mission et la sécurité des militaires et des civils qu’ils s’engagent à protéger en dépendent.

[58] Aux termes de l’article 68 de la Loi, quiconque est présumé avoir commis une infraction au Code de discipline militaire peut être jugé au Canada ou à l’étranger par voie sommaire ou par une cour martiale. Le paragraphe 61(1) fait tomber les civils sous le coup du Code de discipline militaire. Il s’appliquerait également aux membres de notre Cour si elle siégeait dans la zone du théâtre des opérations. Cette possibilité est envisagée au paragraphe 235(1) de la Loi.

[59] Si le Code de discipline militaire énonce les infractions, il établit également la procédure applicable à la poursuite des militaires et à leur défense, y compris le fardeau de preuve auquel il doit être satisfait (norme au-delà de tout doute raisonnable), les options quant au verdict et aux peines, la mise en liberté provisoire par voie judiciaire, la mise en liberté par un commandant, les plaidoyers d’autrefois acquit et autrefois convict, la procédure d’appel et la mise en liberté préalable à l’issue de l’appel.

[60] L’infraction d’ordre militaire est définie par la Loi en ces termes « infraction – à la présente loi, au Code criminel ou à une autre loi fédérale – passible de la discipline militaire » (art. 2). Certaines infractions prévues au Code de discipline militaire sont propres au métier des armes, comme la conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline, la désobéissance à un ordre légitime et l’absence sans permission tandis que d’autres sanctionnent des comportements contraires aux règles de droit générales prévues par le Code criminel ou d’autres lois fédérales. (Loi, art. 130).

[61] Le paragraphe 60(1) de la Loi dispose que le Code de discipline militaire s’applique, notamment, aux « officiers » de la force régulière et, dans certaines circonstances expresses, aux « officiers » de la force de réserve. Tous les juges militaires sont des officiers qui tombent sous le coup de cette disposition. Le paragraphe 60(2) est ainsi libellé :

(2) Quiconque était justiciable du code de discipline militaire au moment où il aurait commis une infraction d’ordre militaire peut être accusé, poursuivi et jugé pour cette infraction sous le régime du code de discipline militaire, même s’il a cessé, depuis que l’infraction a été commise, d’appartenir à l’une des catégories énumérées au paragraphe (1)

(2) Every person subject to the Code of Service Discipline under subsection (1) at the time of the alleged commission by the person of a service offence continues to be liable to be charged, dealt with and tried in respect of that offence under the Code of Service Discipline notwithstanding that the person may have, since the commission of that offence, ceased to be a person described in subsection (1).

[62] Ces précisions sont justifiées. Le commandant, le premier dirigeant du théâtre des opérations, assure le succès de la mission et la sécurité de tous au sein de son unité ou élément. L’obéissance à un ordre, notamment un ordre permanent, qui concerne la réponse à une attaque peut être une question de vie ou de mort. Quiconque n’est pas assujetti au Code de discipline militaire présente un risque pour la mission et la sécurité d’autrui. Dans le théâtre des opérations, si le commandant est incapable de contraindre toute personne au respect du Code de discipline militaire, des vies et le succès de la mission sont en péril.

[63] Les membres des Forces armées canadiennes, contrairement à d’autres citoyens, voire à d’autres fonctionnaires de l’État, ont l’obligation particulière et illimitée de défendre le Canada. Ainsi, les membres des Forces armées canadiennes, y compris les juges militaires, peuvent recevoir l’ordre de se mettre en danger, voire de mener des actions susceptibles de se solder par des blessures ou la mort. Tous les officiers et militaires du rang de la force régulière sont, en tout temps, soumis à l’obligation de service légitime (Loi, art. 33). Dans le métier des armes, on appelle ce principe la responsabilité illimitée.

[64] La discipline est essentielle aux forces armées. Les armes les plus puissantes dont dispose l’État sont confiées aux membres des Forces armées canadiennes. L’utilisation responsable de ces armes est subordonnée au maintien des normes de discipline les plus élevées.

[65] Après le résumé qui précède des concepts de la responsabilité illimitée et de la discipline, il est utile de présenter des exemples concrets de la conduite attendue des membres des Forces armées canadiennes, qui n’est pas celle que l’on attend des civils. Les militaires ne peuvent pas prendre part à des activités politiques, mais ils ont le droit de vote, peuvent assister à des assemblées politiques et se présenter comme candidat à un poste politique à faible visibilité (B-GG-005-027/AF-011 Justice militaire au procès sommaire – V2.2 2/11, p. 1-7). Le principe de l’universalité du service, défini dans les Directives et ordonnances administratives de la défense, 5023-0, aux articles 2.3 et 2.4 exige que tous les militaires soient en bonne condition physique et restreint les droits à l’égalité dont jouissent autrement les militaires en vertu de la législation visant à prohiber la discrimination.

[66] Tous les militaires doivent être en mesure de s’acquitter des tâches générales relatives à la défense et à la sécurité, ainsi que des tâches propres à leur métier, leur profession ou leur vocation au sein des Forces armées canadiennes. Ces exigences s’appliquent à tous, y compris aux officiers qui siègent également à titre de juges militaires.

F. Le rôle du juge militaire est-il incompatible avec celui d’officier?

[67] Aux termes du paragraphe 165.21(1) de la Loi, « [l]e gouverneur en conseil peut nommer juge militaire tout officier qui est avocat inscrit au barreau d’une province et qui a été officier et avocat respectivement pendant au moins dix ans ». L’exigence relative à l’appartenance au barreau depuis au moins dix ans correspond à la norme minimale applicable aux juges de nomination fédérale partout au pays. Ainsi, on s’attend à ce que le candidat possède l’expérience et les connaissances juridiques nécessaires pour rendre des services judiciaires de manière crédible. L’exigence que le candidat à un poste de juge militaire soit officier depuis au moins dix ans est propre au système de justice militaire. Elle témoigne de l’attente à l’égard des candidats qu’ils possèdent de l’expérience des forces armées, qu’ils connaissent le rôle des officiers et qu’ils adhèrent à la philosophie du métier des armes.

[68] Les décisions des juges militaires qui font l’objet des appels ont un dénominateur commun : on ne saurait d’une part être officier militaire et relever du pouvoir exécutif et d’autre part s’acquitter des fonctions d’un juge. Selon les juges militaires, détenir des responsabilités relevant du pouvoir exécutif est incompatible avec le rôle judiciaire. Autrement dit, on est « muté » de l’organe exécutif à l’organe judiciaire dès sa nomination à titre de juge (voir les présents motifs, par. 25). Or, une telle thèse ne tient pas compte de la réalité de notre régime de gouvernement de type Westminster.

[69] Les juges civils en exercice sont souvent sollicités pour présider des commissions d’enquête fédérales ou provinciales ou y participer. Il ne faut pas se leurrer, il s’agit de fonctions relevant du pouvoir exécutif, dont on s’acquitte à la demande de ce dernier (voir Dixon c. Canada (Commission d’enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie – Commission Létourneau), [1997] 3 C.F. 169, [1997] A.C.F. n985, par. 13); Canada (Procureur général) c. Canada (Commission d’enquête sur le système d’approvisionnement en sang au Canada – Commission Krever), [1997] 3 R.C.S. 440, 1997 CanLII 323). Des exemples récents de commissions d’enquête : Commission ontarienne d’enquête sur la COVID-19 dans les foyers de soins de longue durée, présidée par un juge jusqu’à sa retraite en novembre 2020; la Commission d’enquête sur les actions des responsables canadiens relativement à Maher Arar et la commission d’enquête sur les faits s’étant produits à Walkerton, toutes deux présidées par une personne nommée juge en chef adjoint de l’Ontario; la commission d’enquête sur l’affaire Desmond, présidée par un juge de la Cour provinciale de Nouvelle-Écosse et la commission d’enquête sur le blanchiment de fonds en Colombie-Britannique, présidée par un juge de la Cour suprême de cette province.

[70] De même, plusieurs juges de la Cour fédérale siègent à des commissions et tribunaux administratifs. Par exemple, un juge de la Cour fédérale préside la Commission du droit d’auteur du Canada et un autre, le Tribunal de la concurrence. Ajoutons que le paragraphe 77.013(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, L.R.C. (1985), ch. S-15, dispose que les juges des cours supérieures peuvent siéger à des formations binationales comme celles que prévoient les paragraphes 1 à 4 de l’annexe 10-B.1 de l’accord entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Également, le paragraphe 20.7(1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, L.C. 2005, ch. 46, prévoit que les membres du Tribunal sont des juges de la Cour fédérale ou d’une cour supérieure d’une province. Comme il est mentionné plus haut, de telles formations et commissions d’enquête relèvent de l’organe exécutif. Leurs membres s’acquittent de fonctions ressortissant au judiciaire et à l’exécutif simultanément. Le travail du Conseil canadien de la magistrature en matière de discipline ressortit à l’exercice du pouvoir exécutif plutôt que judiciaire (voir Girouard c. Canada (Procureur général), 2018 CF 865, [2018] A.C.F. no 904, conf. 2019 CAF 148)

[71] N’oublions pas que l’exécutif nomme les juges et en choisit certains pour un mandat aux cours d’appel et à la Cour suprême du Canada. On pourrait assimiler ces nominations à des « promotions ». Ceux qui sollicitent de telles nominations devraient-ils déclarer que le système entier est dépourvu d’indépendance et d’impartialité en raison du rôle qu’y joue l’exécutif en acceptant ou rejetant leur candidature?

[72] Enfin, signalons qu’à l’heure actuelle, le juge en chef du Canada joue le rôle d’administrateur du gouvernement du Canada jusqu’à la nomination d’un nouveau gouverneur général. Il est le représentant officiel de la Reine au Canada. Son cabinet est ainsi partie à chaque dénonciation et chef d’accusation déposé en cour de juridiction criminelle. Une personne raisonnable, au courant de tous les faits, y compris des protections dont jouit le juge en chef du Canada quant au traitement et à l’inamovibilité, estimerait-elle ce dernier incapable de trancher des affaires auxquelles est partie le gouvernement du Canada, vu ses deux rôles de juge en chef et d’administrateur? Nous ne croyons pas.

[73] En conclusion, ces exemples démontrent qu’à l’occasion des membres de la magistrature s’acquittent de fonctions ressortissant au pouvoir exécutif sans compromettre l’indépendance institutionnelle ou susciter des préoccupations à propos de leur impartialité. Est-ce la situation idéale? Peut-être pas. Est-ce partie des conventions que comprend notre système de gouvernement? Oui. Cette situation est acceptable et ne contrevient pas à l’alinéa 11d) ou au critère relatif à l’existence de partialité parce que, si l’on place ces fonctions dans leur cadre légal élargi, on s’aperçoit de l’existence des protections constitutionnelles qui garantissent l’indépendance et l’impartialité. Nous y reviennons ci-après.

[74] La Cour suprême du Canada, dans le Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale de l’Île-du-Prince-Édouard, [1997] 3 R.C.S. 3, 1997 CanLII 317 et l’arrêt Committee for Justice and Liberty, nous enseigne que l’évaluation de l’indépendance institutionnelle et de l’impartialité est objective autant que contextuelle. Elle exige que l’on s’attarde au rôle et aux fonctions des cours martiales, aux principes qui sous-tendent le système de justice militaire et aux autres facteurs qui jouent sur l’indépendance institutionnelle des cours martiales et l’impartialité de leurs juges. Ces facteurs comptent notamment le serment d’office, les protections légales d’inamovibilité des juges, leur traitement, les conventions régissant l’exercice du pouvoir discrétionnaire de poursuite et la mesure dans laquelle notre démocracie constitutionnelle de type Westminster permet aux membres de la magistrature de s’acquitter de fonctions ressortissant au pouvoir exécutif.

[75] L’indépendance institutionnelle de la magistrature n’est pas absolue. Dans l’arrêt R. c. Lippé, [1991] 2 R.C.S. 114, à la page 142, le juge en chef Lamer affirme que « la Constitution ne garantit pas toujours la situation “idéale”. Le système idéal pourrait peut-être consister en une formation de trois ou cinq juges qui entendraient chaque affaire; c’est peut-être là l’idéal, mais on ne peut certainement pas dire que la Constitution le garantit ». Dans l’arrêt MacKeigan c. Hickman, [1989] 2 R.C.S. 796 [MacKeigan], la juge McLachlin (plus tard juge en chef) fait observer qu’une séparation complète de la magistrature et des autres organes du gouvernement n’est pas réaliste :

Il est impossible de concevoir un pouvoir judiciaire dénué de tout rapport avec les pouvoirs législatif et exécutif du gouvernement. Les lois régissent la nomination et la mise à la retraite des juges; elles dictent les modalités de l’exercice de leurs fonctions et de leur rémunération. Le Parlement détient le pouvoir de destituer hyperpour un motif déterminé les juges nommés par le fédéral, et des textes de loi comme la Loi sur la Cour suprême, S.R.C. 1970, chap. S-19, traitent de matières telles que le nombre de juges requis pour qu’il y ait quorum. Des relations de ce genre sont inévitables et nécessaires entre les organes judiciaire et législatif du gouvernement.

[p. 827]

G. Le rôle du comité d’enquête sur les juges militaires

[76] Selon les intimés, il existe plusieurs remèdes aux maux qu’ils ont soulevés. Premièrement, les juges militaires sont justiciables des cours civiles pour les infractions civiles commises pendant leur mandat. Les intimées sont d’avis qu’il s’agit d’un moyen d’assurer le respect à l’égard du système. Deuxièmement, les juges militaires peuvent être assujettis au Code de discipline militaire après la fin de leur mandat, c’est-à-dire une fois que leur mandat est révoqué, qu’ils sont libérés à leur demande ou qu’ils ont pris leur retraite. Troisièmement, selon tous les juges militaires ayant abordé le sujet, il y a le comité d’enquête. Nous renvoyons aux observations du juge militaire Pelletier dans la décision Pett, au par. 131 et la décision Iredale, au par. 33; la juge militaire Sukstorf dans la décision D’Amico aux par. 59, 68 et 70 et le juge militaire D’Auteuil dans la décision Edwards au par. 46.

[77] La genèse et le rôle du comité d’enquête sont les suivants. Par suite de l’arrêt Généreux, le juge en chef Lamer, à la retraite, s’est vu confier le mandat de mener une enquête en vue de faire des recommandations sur des modifications possibles à la Loi visant à améliorer l’indépendance et l’impartialité du système des cours martiales. À l’issue de l’enquête, le législateur a modifié la Loi par la création du comité d’enquête, prévu à l’article 165.31. Un juge militaire peut seulement être révoqué conformément au paragraphe 165.32(7), ci-après :

Recommandation au gouverneur en conseil

Recommendation to the Governor in Council

(7) Le comité peut recommander au gouverneur en conseil de révoquer le juge militaire s’il est d’avis que celui-ci, selon le cas :

(7) The inquiry committee may recommend to the Governor in Council that the military judge be removed if, in its opinion:

a) est inapte à remplir ses fonctions judiciaires pour l’un ou l’autre des motifs suivants :

(a) the military judge has become incapacitated or disabled from the due execution of his or her judicial duties by reason of

(i) infirmité,

(i) infirmity,

(ii) manquement à l’honneur et à la dignité,

(ii) having been guilty of misconduct,

(iii) manquement aux devoirs de la charge de juge militaire,

(iii) having failed in the due execution of his or her judicial duties, or

(iv) situation d’incompatibilité, qu’elle soit imputable au juge militaire ou à toute autre cause;

(iv) having been placed, by his or her conduct or otherwise, in a position incompatible with the due execution of his or her judicial duties; or

b) ne possède pas les aptitudes physiques et l’état de santé exigés des officiers.

(b) the military judge does not satisfy the physical and medical fitness standards applicable to officers.

Rapport

Report

(8) Le comité transmet le rapport de ses conclusions et le dossier de l’enquête au ministre et, si l’enquête a été tenue en public, rend le rapport accessible au public.

(8) The inquiry committee shall provide to the Minister a record of each inquiry and a report of its conclusions. If the inquiry was held in public, the inquiry committee shall make its report available to the public.

[78] Le sous-alinéa (7)a)(ii) est révélateur. L’on ne peut être reconnu coupable sans avoir été jugé; l’on ne peut être jugé sans avoir subi son procès; l’on ne peut subir son procès sans avoir été accusé. Nous sommes d’avis qu’une interprétation contextuelle ainsi que le sens ordinaire des mots de cette disposition renvoient à une déclaration de culpabilité sous le régime du Code de discipline militaire, du Code criminel ou d’une autre loi (Sullivan, Ruth. Statutory Interpretation, 3e éd. Toronto, Irwin Law, 2016, p. 7 et 8).

[79] L’alinéa 7b) énonce la possibilité qu’un juge militaire soit révoqué pour avoir manqué à la norme, applicable aux officiers, en matière d’aptitudes physiques. Comme il est mentionné plus haut (au par. 62) l’universalité du service est une attente applicable à tous les militaires. Cette disposition témoigne de l’intention du législateur, selon laquelle les juges militaires doivent être tenus aux mêmes normes, physiques ou autres, que leurs confrères soldats.

[80] Le comité d’enquête établi sous le régime de la Loi joue un rôle semblable à celui qui est formé sous l’égide du Conseil canadien de la magistrature. Les remarques les plus récentes sur la fonction de ce dernier se trouvent dans la décision Girouard c. Canada (Procureur général), 2019 CF 1282, [2019] A.C.F. no 1154 [Girouard]. Le juge Rouleau explique les responsabilités et les limites de ce comité en ces termes :

À maintes reprises, le Conseil et les cours de justice ont statué sur la fonction du Conseil. Il a été décidé que le Conseil n’est pas un forum devant lequel se présentent deux opposants pour que soit rendu un verdict final sur les sanctions à être imposées à un juge. À cet effet, des comités d’enquête ont exprimé ce qui suit dans deux décisions antérieures :

[Un comité d’enquête] ne tranche pas des litiges entre parties, ne rend pas des jugements exécutoires et son rôle consiste à mener une enquête et à faire rapport au Conseil.

[. . .]

Or, le comité d’enquête n’a aucun pouvoir d’imposer des sanctions de quelque nature qu’elles soient. Il ne peut établir ni la responsabilité civile du juge ni sa culpabilité criminelle. Il en est de même pour le Conseil sur réception du rapport du comité d’enquête. Ainsi, peu importe l’issue du processus, il est certain que celui-ci n’expose pas le juge qui en fait l’objet à des sanctions de nature pénale.

[Girouard, par. 59].

[81] Le comité d’enquête ne rend pas de verdict final. Il n’inflige pas de sanctions. Il ne se prononce pas sur la responsabilité civile ou pénale. Il présente ses recommandations au ministre.

[82] On peut déterminer l’objet et les limites du comité d’enquête à la lumière de l’affaire Girouard. Tout comme le comité d’enquête établi sous le régime du Conseil canadien de la magistrature, le comité d’enquête sur les juges militaires n’inflige pas de sanctions, ne se prononce pas sur la responsabilité civile ou ne rend pas de conclusion sur la culpabilité pénale. Fait important de la perspective d’un défendeur, point n’est besoin de démontrer la perpétration de l’infraction hors de tout doute raisonnable, et les règles de preuve, s’il en est, sont assouplies.

[83] À notre avis, l’analyse des juges militaires dans les affaires faisant l’objet des appels est viciée par plusieurs erreurs fondamentales. Premièrement, la juge militaire Sukstorf affirme à tort au paragraphe 68 de la décision D’Amico que le rôle du comité d’enquête à l’égard des juges militaires est identique à celui des cours martiales. Comme il est souligné plus haut, le comité d’enquête ne tranche rien. Il présente des recommandations suivant la prépondérance de la preuve, ce qui est loin de la norme de preuve hors de tout doute raisonnable. Le comité d’enquête n’est pas habilité à infliger des sanctions disciplinaires ou à faire des recommandations concernant la discipline, outre une recommandation de révocation.

[84] Deuxièmement, la juge militaire Sukstorf affirme à tort au paragraphe 70 de la décision D’Amico que les allégations traitées par le comité d’enquête dans l’affaire du juge militaire en chef Dutil ont été examinées par une cour martiale. Rien n’indique que les allégations dont était saisi le comité d’enquête dans l’affaire Dutil étaient celles-là même ayant fondé la poursuite du juge militaire en chef Dutil. En fait, il ressort des motifs de la décision Dutil que le Service national des enquêtes des Forces canadiennes disposait d’autres renseignements, dont de nouvelles allégations de fraude, que le comité d’enquête n’avait pas trois ans auparavant.

H. Exercice quasi judiciaire du pouvoir discrétionnaire de poursuite

[85] Passons à la poursuite de juges militaires, que nous assimilons, pour être francs, à la poursuite d’un juge de l’une des cours civiles de Sa Majesté. C’est l’un des éléments qui appartient au critère servant à déterminer si un observateur bien renseigné estimerait que l’impartialité et l’indépendance d’une cour de justice sont compromises.

[86] La primauté du droit ne protège pas les juges en exercice contre les poursuites. Aucune règle ne le devrait. Les juges peuvent être visés par un mandat de perquisition obtenu par un membre de l’organe exécutif. Ils peuvent être arrêtés par les policiers qui comparaissent devant eux régulièrement. Ils peuvent voir leurs actes examinés par un procureur chargé du mandat constitutionnel de déterminer les chances d’obtenir une déclaration de culpabilité ainsi que l’intérêt public à la poursuite. Les juges peuvent, si nécessaire, être jugés par un confrère. Ce sont là des caractéristiques de la vie au sein d’une société démocratique fondée sur la primauté du droit. Personne n’est au-dessus des lois, ni les juges civils, ni les juges militaires.

[87] À notre avis, c’est exactement ainsi que notre société doit fonctionner. Ce principe est à notre sens si fondamental qu’il serait honteux d’avoir à le justifier au moyen d’une disposition de la Charte, de la Déclaration des droits, de la Magna Carta ou de tout autre principe constitutionnel ou disposition légale. Exiger une telle justification affaiblirait fondamentalement le concept incontestable selon lequel personne, au sein de notre démocratie, n’est au-dessus des lois. Rien ne permet d’affirmer qu’un juge militaire qui conduit avec les facultés affaiblies ou commet des voies de fait est à l’abri d’une poursuite intentée sous le régime du système de justice militaire. Le fait que les juges soient assujettis à des contraintes pénales, civiles et disciplinaires ne mène pas une personne raisonnablement bien renseignée, qui examinerait la situation de manière objective, à conclure qu’un juge manquerait à son serment et se montrerait partial.

[88] Les intimés invoquent à l’appui de leur thèse – selon laquelle les juges militaires ne doivent pas être assujettis au Code de discipline militaire – le risque de mauvaise foi de la part des procureurs et commandants. Ils invoquent l’arrêt R. c. Nur, 2015 CSC 15, [2015] 1 R.C.S. 773 [Nur] au soutien de la thèse selon laquelle le pouvoir discrétionnaire de poursuite ne saurait protéger une loi inconstitutionnelle. Toutefois, il est possible d’établir une distinction d’avec l’arrêt Nur. Dans cette affaire, la poursuite tentait de sauvegarder une disposition susceptible d’emporter une peine minimale en affirmant que le procureur pouvait opter pour la poursuite par procédure sommaire plutôt que par voie de mise en accusation. La Couronne prétendait que l’exercice sage et prudent du pouvoir discrétionnaire de poursuite atténuerait les effets d’une peine minimale obligatoire disproportionnée. La Cour suprême conclut que l’exercice du pouvoir discrétionnaire de poursuite ne saurait sauvegarder une loi inconstitutionnelle.

[89] Les appels dont nous sommes saisis sont différents. Les intimés soulèvent la possibilité qu’un poursuivant mécontent dépose des accusations contre un juge militaire pour exercer une contrainte ou pour se venger d’une décision antérieure négative, et mine ainsi l’indépendance institutionnelle des juges militaires.

[90] Il faut, en examinant le contexte des poursuites potentielles contre des juges militaires, connaître la norme constitutionnelle suivant laquelle les poursuivants et commandants exercent leur pouvoir discrétionnaire de poursuite d’une manière quasi judiciaire et indépendamment de toute influence partisane et s’attendre à ce que ces derniers la respectent. La Cour suprême aborde la question, dans un contexte quelque peu différent, dans l’arrêt Cawthorne :

[…] À l’instar du procureur général ou des autres fonctionnaires exerçant une fonction de poursuivant, le ministre a droit au bénéfice d’une forte présomption qu’il exerce son pouvoir discrétionnaire en matière de poursuites indépendamment de toute considération partisane. Le simple fait que le ministre est membre du Cabinet n’écarte pas cette présomption. En effet, la loi présume que le procureur général – lui aussi membre du Cabinet – peut faire abstraction des obligations partisanes et en fait abstraction dans l’exercice de ses responsabilités de poursuivant. Il n’y a aucune raison impérieuse de traiter le ministre différemment à cet égard.

[par. 32]

[91] La Cour suprême vient de confirmer ce principe dans l’arrêt Ontario (Procureur général) c. Clark, 2021 CSC 18, [2021] A.C.S. no 18, aux par. 32 et 33,

[32] En conséquence, la Couronne a notamment l’obligation d’agir de façon objective, indépendante et équitable envers l’accusé. Ces impératifs « ne se limite[nt] pas à la salle d’audience et [ils] lie[nt] le procureur de la Couronne dans toutes les mesures qu’il prend relativement à l’accusé » plus généralement (Regan, par. 155-156, le juge Binnie, dissident). Dans l’arrêt R. c. Cawthorne, [2016] 1 R.C.S. 983, la Cour a reconnu que l’accusé a le droit constitutionnel, en vertu d’un principe de justice fondamentale reconnu par l’art. 7 de la Charte, d’être jugé par un poursuivant qui n’est pas motivé par des fins illégitimes (par. 23‑26, la juge en chef McLachlin).

[33] Le procureur général et ses représentants ont également l’obligation de défendre l’intérêt public lorsqu’ils exercent leurs fonctions de poursuivants (Cawthorne, par. 27). Ils protègent « l’intérêt de la collectivité à faire en sorte que justice soit adéquatement rendue » (R. c. Power, [1994] 1 R.C.S. 601, p. 616, la juge L’Heureux Dubé). Leur tâche ultime « consiste à veiller à ce que l’intérêt public soit servi, dans toute la mesure du possible, par le recours ou l’absence de recours aux tribunaux criminels » (Regan, par. 159, le juge Binnie, dissident quant au résultat, citant le Rapport du comité consultatif du procureur général sur le filtrage des accusations, la divulgation et les pourparlers de règlement (1993) (« Rapport Martin »), p. 117 (soulignement omis)).

[92] Rien ne démontre qu’un juge militaire a déjà été poursuivi de mauvaise foi. Rien ne démontre non plus que l’instruction des poursuites a déjà mené à des accusations sous le régime du Code de discipline militaire. Quoi qu’il en soit, les réparations en cas de poursuite abusive ou d’abus de procédure sont suffisantes pour remédier à cette possibilité. Il ne fait aucun doute que le commandant mettrait fin à des accusations frivoles provenant d’autres sources. Nous reconnaissons volontiers que ces normes en matière de poursuites protègent les intérêts des juges militaires et qu’elles ne sont pas tout à fait pertinentes dans les cas qui nous occupent, c’est-à-dire les droits garantis par l’alinéa 11d) à tout inculpé. Toutefois, l’existence de tels outils, y compris les limites légitimes, quasi constitutionnelles et pratiques à l’exercice du pouvoir discrétionnaire de poursuite doit faire partie du contexte sous-tendant l’analyse actuelle.

VI. Les articles 12, 18 et 60 de la Loi enfreignent-ils les droits que l’alinéa 11d) de la Charte garantit aux intimés?

[93] La capitaine Crépeau, par voie d’appel incident, attaque la constitutionnalité des articles 12, 18 et 60 de la Loi. Selon elle, ces dispositions enfreignent les droits que la Charte garantit à tout inculpé, car elles fournissent à la hiérarchie militaire les outils lui permettant d’exercer une influence indue sur les juges militaires.

[94] La Cour suprême du Canada a confirmé à plusieurs reprises la constitutionnalité des procès de militaires par des officiers (voir les arrêts Généreux, p. 336, et Stillman, par. 70). L’appel incident n’est pas fondé. Nous sommes d’avis de le rejeter pour les motifs qui précèdent. Les juges militaires sont des officiers des Forces armées canadiennes et sont assujettis au Code de discipline militaire.

VII. Requête en autorisation de déposer une nouvelle preuve

[95] Au moment où la Cour s’apprêtait à publier ses motifs de décision dans les appels, les intimés ont déposé un avis de requête en autorisation de présenter de nouveaux éléments de preuve. Selon eux, cette nouvelle preuve donne à entendre que la Cour n’est pas [traduction] « indépendante comme l’exige la Constitution et pourrait donc être mal placée pour trancher les présents appels ».

[96] La nouvelle preuve est constituée d’allocutions présentées les 10 et 11 mai 2021 aux audiences de la Commission d’examen de la rémunération des juges par le juge en chef Bell de la Cour d’appel de la cour martiale du Canada (CACMC) et le juge Scanlan de la même cour. Les éléments concernent les défis que présentent pour le travail du juge en chef au sein de la CACMC sa charge de juge de la Cour fédérale et les besoins concurrents des deux cours de justice en matière de ressources. Les éléments portent surtout sur la conciliation difficile, sur le plan du temps et des ressources, des tâches administratives de la CACMC et d’une charge de juge à la Cour fédérale. La preuve ne porte pas sur les affaires devant la CACMC et personne n’insinue que les besoins en ressources des deux cours ont nui à quelque affaire devant la CACMC.

[97] Les intimés affirment craindre raisonnablement que la Cour est dépourvue de l’indépendance qu’exige la Constitution et demandent à la Cour d’autoriser le dépôt de cette nouvelle preuve et de les autoriser à soulever la question de l’indépendance de la Cour.

[98] Le critère qui régit l’admission de nouveaux éléments est bien connu. Il est énoncé dans l’arrêt Palmer c. La Reine, [1980] 1 R.C.S. 759, en ces termes :

  1. On ne devrait généralement pas admettre une déposition qui, avec diligence raisonnable, aurait pu être produite au procès, à condition de ne pas appliquer ce principe général de manière aussi stricte dans les affaires criminelles que dans les affaires civiles;

  2. La déposition doit être pertinente, en ce sens qu’elle doit porter sur une question décisive ou potentiellement décisive quant au procès;

  3. La déposition doit être plausible, en ce sens qu’on puisse raisonnablement y ajouter foi; et

  4. elle doit être telle que si l’on y ajoute foi, on puisse raisonnablement penser qu’avec les autres éléments de preuve produits au procès, elle aurait influé sur le résultat.

[99] Nous ne sommes pas d’avis d’admettre la preuve. Le double rôle du juge en chef de la CACMC est établi par une loi.

[100] L’article 234 de la Loi dispose ainsi :

(2) La Cour d’appel de la cour martiale est composée de la façon suivante :

(2) the judges of the Court Martial Appeal Court are

a) au moins quatre juges de la Cour fédérale ou de la Cour d’appel fédérale désignés par le gouverneur en conseil;

(a) not fewer than four judges of the Federal court of appeal or the Federal Court to be designated by the Governor in Council; and

b) tout autre juge d’une cour supérieure de juridiction criminelle nommé par le gouverneur en conseil.

(b) any additional judges of a superior court of criminal jurisdiction who are appointed by the Governor in Council.

[…]

[…]

(3) Le gouverneur en conseil désigne le juge en chef. Celui-ci préside les séances de la Cour d’appel de la cour martiale et nomme, sous réserve du paragraphe (4), un autre juge pour assumer la présidence en son absence.

(3) The Governor in council shall designate one of the judges of the Court Martial Appeal; Court to be the Chief Justice thereof, who shall preside, when present, at any sittings of the Court and shall, subject to subsection (4), appoint another judge to preside at any sittings of the Court at which the Chief Justice is not present.

[101] Tous les membres de la CACMC siègent également à d’autres cours. La possibilité qu’ils aient à concilier leurs tâches au sein de chacune ressort clairement de l’arrangement prévu dans la Loi.

[102] Cette preuve aurait pu être présentée avec une diligence raisonnable avant la tenue de l’audience dans les présents appels. L’audience a été tenue le 29 janvier 2021; la requête a été présentée seulement le 18 mai 2021. La teneur précise des divergences quant aux questions administratives révélées dans les témoignages devant la Commission quadriennale importe peu. La possibilité que les juges aient à concilier des besoins concurrents n’est pas nouvelle.

[103] La preuve n’a aucune incidence sur le fond des appels dont la Cour est saisie.

[104] C’est suffisant pour justifier le rejet de la requête en autorisation de déposer une nouvelle preuve.

[105] Or, nous n’en restons pas là. Nous signalons que la preuve proposée ne saurait fonder quelque crainte quant à l’indépendance institutionnelle de la CACMC. Il est attendu du juge en chef de toute cour de justice qu’il ou elle sollicite les ressources dont son tribunal a besoin. Lorsque les juges en chef s’acquittent bien de cette tâche, devant la bonne tribune, ce sont les plaideurs qui comparaissent devant cette cour et l’intérêt public qui en bénéficient.

[106] La garantie constitutionnelle d’indépendance judiciaire « n’existe pas au profit des juges, mais bien au profit du public » (Conférence des juges de paix magistrats du Québec c. Québec (Procureure générale), 2016 CSC 39, [2016] 2 R.C.S. 116, par. 89).

[107] Les cours auxquelles appartiennent les juges de la CACMC – dont l’indépendance n’est à juste titre pas mise en doute – n’ont aucun intérêt dans les affaires que la Cour est appelée à trancher. En outre, si ces cours sollicitent bel et bien le temps des juges de la CACMC, la preuve proposée ne démontre pas que de telles pressions « portent directement et immédiatement sur l'exercice des fonctions judiciaires » (Valente c. La Reine, [1985] 2 R.C.S. 673, par. 52).

[108] Une personne bien renseignée, qui étudierait la question de manière réaliste et pratique, ne conclurait pas à l’existence d’un risque que l’équité dans le processus décisionnel soit compromise par les divergences présentées à la Commission quadriennale. La preuve proposée n’est pas susceptible de susciter de doutes quant à l’indépendance institutionnelle de la Cour.

[109] Enfin, le principe de la finalité des jugements milite contre l’autorisation de déposer de nouveaux éléments de preuve après la tenue de l’audience sur le fond. Il a été sursis aux procès en première instance, et plusieurs affaires sont retardées jusqu’à l’issue des présents appels. L’intérêt public ne saurait admettre d’autre retard dans ces affaires. Nous ne sommes pas convaincus qu’une erreur judiciaire résulterait de notre décision de refuser l’autorisation de déposer une nouvelle preuve, tout particulièrement compte tenu du fait que l’argument proposé dans cette preuve aurait pu être présenté à l’audience.

[110] Le 4 juin 2021, les intimés ont déposé une autre requête dans laquelle ils demandent à la Cour d’admettre comme nouvelle preuve le rapport déposé le 1er juin, 2021 par l’honorable Morris J. Fish, Rapport de l’autorité du troisième examen indépendant au ministre de la Défense nationale au titre du paragraphe 273.601(1) de la Loi sur la défense nationale, LRC 1985, c N‑5. Il avait été chargé d’étudier la structure et le fonctionnement du système de justice militaire, et il a présenté ses recommandations au ministre de la Défense en vue de l’amélioration de ce système.

[111] Nous ne sommes pas d’avis d’admettre cette preuve. Elle n’est pas utile à la Cour qui est appelée à décider si les contestations que soulèvent les présents appels permettent de conclure que les cours de première instance sont dépourvues d’indépendance institutionnelle et sont ainsi lacunaires sur le plan constitutionnel.

[112] Différer à nouveau la décision en l’espèce causerait des retards intolérables. Pour les motifs qui précèdent, nous estimons que les préoccupations sur la finalité des décisions l’emportent sur la valeur limitée, pour l’examen des questions dont la Cour est saisie, qu’aurait l’admission en preuve du rapport.

[113] La requête en autorisation de déposer une nouvelle preuve est rejetée.

VIII. Conclusion

[114] Une personne renseignée, qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique ne pourrait à notre avis arriver à une autre conclusion que les juges militaires satisfont aux normes minimales constitutionnelles d’impartialité et d’indépendance qu’exige l’alinéa 11d) de la Charte. Les juges militaires sont assujettis au Code de discipline militaire tout au long de leur mandat. L’ordre contesté ne porte pas atteinte aux droits que l’alinéa 11d) de la Charte garantit aux intimés. L’appel incident n’est pas fondé.

[115] Pour les motifs qui précèdent, nous accueillons les appels et rejettons l’appel incident interjeté par la capitaine Crépeau.

« B. Richard Bell »

juge en chef

« Donald J Rennie »

j.c.a.

« Gladys I. Pardu »

j.c.a.


ANNEX

Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11

Canadian Charter of Rights and Freedoms, Part I of the Constitution Act, 1982, being Schedule B to the Canada Act 1982 (UK), 1982, c 11

11 Tout inculpé a le droit :

11 Any person charged with an offence has the right

d) d’être présumé innocent tant qu’il n’est pas déclaré coupable, conformément à la loi, par un tribunal indépendant et impartial à l’issue d’un procès public et équitable

(d) to be presumed innocent until proven guilty according to law in a fair and public hearing by an independent and impartial tribunal

 

Loi sur la défense nationale, L.R.C. (1985), ch. N-5

National Defence Act, R.S.C., 1985, c. N-5

2. infraction d’ordre militaire Infraction — à la présente loi, au Code criminel ou à une autre loi fédérale — passible de la discipline militaire

2. service offence means an offence under this Act, the Criminal Code or any other Act of Parliament, committed by a person while subject to the Code of Service Discipline;

En blanc

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12 (1) Le gouverneur en conseil peut prendre des règlements concernant l’organisation, l’instruction, la discipline, l’efficacité et la bonne administration des Forces canadiennes et, d’une façon générale, en vue de l’application de la présente loi.

12 (1) The Governor in Council may make regulations for the organization, training, discipline, efficiency, administration and good government of the Canadian Forces and generally for carrying the purposes and provisions of this Act into effect.

(2) Sous réserve de l’article 13 et des règlements du gouverneur en conseil, le ministre peut prendre des règlements concernant l’organisation, l’instruction, la discipline, l’efficacité et la bonne administration des Forces canadiennes et, d’une façon générale, en vue de l’application de la présente loi.

(2) Subject to section 13 and any regulations made by the Governor in Council, the Minister may make regulations for the organization, training, discipline, efficiency, administration and good government of the Canadian Forces and generally for carrying the purposes and provisions of this Act into effect.

(3) Le Conseil du Trésor peut, par règlement :

(3) The Treasury Board may make regulations

a) fixer les taux et conditions de versement de la solde des juges militaires, du directeur des poursuites militaires et du directeur du service d’avocats de la défense;

(a) prescribing the rates and conditions of issue of pay of military judges, the Director of Military Prosecutions and the Director of Defence Counsel Services;

b) fixer, en ce qui concerne la solde et les indemnités des officiers et militaires du rang, les suppressions et retenues;

(b) prescribing the forfeitures and deductions to which the pay and allowances of officers and non-commissioned members are subject; and

c) prendre toute mesure concernant la rémunération ou l’indemnisation des officiers et militaires du rang qu’il juge nécessaire ou souhaitable de prendre par règlement pour l’application de la présente loi.

(c) providing for any matter concerning the pay, allowances and reimbursement of expenses of officers and non-commissioned members for which the Treasury Board considers regulations are necessary or desirable to carry out the purposes or provisions of this Act.

(4) Tout règlement pris en vertu de l’alinéa (3)a) peut avoir un effet rétroactif s’il comporte une disposition en ce sens; il ne peut toutefois, dans le cas des juges militaires, avoir d’effet :

(4) Regulations made under paragraph (3)(a) may, if they so provide, have retroactive effect. However, regulations that prescribe the rates and conditions of issue of pay of military judges may not have effect

a) dans le cas de l’examen prévu à l’article 165.34, avant la date prévue au paragraphe 165.34(3) pour le commencement des travaux qui donnent lieu à la prise du règlement;

(a) in the case of an inquiry under section 165.34, before the day referred to in subsection 165.34(3) on which the inquiry that leads to the making of the regulations is to commence; or

b) dans le cas de l’examen prévu à l’article 165.35, avant la date du début de l’examen qui donne lieu à la prise du règlement.

(b) in the case of an inquiry under section 165.35, before the day on which the inquiry that leads to the making of the regulations commences.

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18 (1) Le gouverneur en conseil peut élever au poste de chef d’état-major de la défense un officier dont il fixe le grade. Sous l’autorité du ministre et sous réserve des règlements, cet officier assure la direction et la gestion des Forces canadiennes.

18 (1) The Governor in Council may appoint an officer to be the Chief of the Defence Staff, who shall hold such rank as the Governor in Council may prescribe and who shall, subject to the regulations and under the direction of the Minister, be charged with the control and administration of the Canadian Forces.

(2) Sauf ordre contraire du gouverneur en conseil, tous les ordres et directives adressés aux Forces canadiennes pour donner effet aux décisions et instructions du gouvernement fédéral ou du ministre émanent, directement ou indirectement, du chef d’état-major de la défense.

(2) Unless the Governor in Council otherwise directs, all orders and instructions to the Canadian Forces that are required to give effect to the decisions and to carry out the directions of the Government of Canada or the Minister shall be issued by or through the Chief of the Defence Staff.

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29.101 Malgré le paragraphe 29.1(1), le grief déposé par le juge militaire est étudié et réglé par le chef d’état-major de la défense.

29.101 Despite subsection 29.1(1), a grievance submitted by a military judge shall be considered and determined by the Chief of the Defence Staff.

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33 (1) La force régulière, ses unités et autres éléments, ainsi que tous ses officiers et militaires du rang, sont en permanence soumis à l’obligation de service légitime.

33 (1) The regular force, all units and other elements thereof and all officers and non-commissioned members thereof are at all times liable to perform any lawful duty.

(2) La force de réserve, ses unités et autres éléments, ainsi que tous ses officiers et militaires du rang, peuvent être :

(2) The reserve force, all units and other elements thereof and all officers and non-commissioned members thereof

a) astreints à l’instruction pour les périodes fixées par règlement du gouverneur en conseil;

(a) may be ordered to train for such periods as are prescribed in regulations made by the Governor in Council; and

b) soumis à l’obligation de service légitime autre que l’instruction, aux époques et selon les modalités fixées par le gouverneur en conseil par règlement ou toute autre voie.

(b) may be called out on service to perform any lawful duty other than training at such times and in such manner as by regulations or otherwise are prescribed by the Governor in Council.

(3) Le paragraphe (2) n’a pas pour effet d’imposer, sans son consentement, les obligations qui y sont décrites à un officier ou militaire du rang de la force de réserve qui, aux termes de son enrôlement, n’est astreint qu’au service actif.

(3) Nothing in subsection (2) shall be deemed to impose liability to serve as prescribed therein, without his consent, on an officer or non-commissioned member of the reserve force who is, by virtue of the terms of his enrolment, liable to perform duty on active service only.

(4) Pour l’application du présent article, service s’entend, outre des tâches de nature militaire, de toute tâche de service public autorisée sous le régime de l’article 273.6.

(4) In this section, duty means any duty that is military in nature and includes any duty involving public service authorized under section 273.6.

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60 (1) Sont seuls justiciables du code de discipline militaire :

60 (1) The following persons are subject to the Code of Service Discipline:

a) les officiers ou militaires du rang de la force régulière;

(a) an officer or non-commissioned member of the regular force;

b) les officiers ou militaires du rang de la force spéciale;

(b) an officer or non-commissioned member of the special force;

c) les officiers ou militaires du rang de la force de réserve se trouvant dans l’une ou l’autre des situations suivantes :

(c) an officer or non-commissioned member of the reserve force when the officer or non-commissioned member is

(i) en période d’exercice ou d’instruction, qu’ils soient en uniforme ou non,

(i) undergoing drill or training, whether in uniform or not,

(ii) en uniforme,

(ii) in uniform,

(iii) de service,

(iii) on duty,

(iv) [Abrogé, 1998, ch. 35, art. 19]

(iv) [Repealed, 1998, c. 35, s. 19]

(v) appelés, dans le cadre de la partie VI, pour prêter main-forte au pouvoir civil,

(v) called out under Part VI in aid of the civil power,

(vi) appelés en service,

(vi) called out on service,

(vii) en service actif,

(vii) placed on active service,

(viii) à bord d’un navire, véhicule ou aéronef des Forces canadiennes ou dans — ou sur — tout établissement de défense ou ouvrage pour la défense,

(viii) in or on any vessel, vehicle or aircraft of the Canadian Forces or in or on any defence establishment or work for defence,

(ix) en service dans une unité ou un autre élément de la force régulière ou de la force spéciale,

(ix) serving with any unit or other element of the regular force or the special force, or

(x) présents, en uniforme ou non, à l’exercice ou l’instruction d’une unité ou d’un autre élément des Forces canadiennes;

(x) present, whether in uniform or not, at any drill or training of a unit or other element of the Canadian Forces;

d) sous réserve des exceptions, adaptations et modifications que le gouverneur en conseil peut prévoir par règlement, les personnes qui, d’après la loi ou un accord entre le Canada et l’État dans les forces armées duquel elles servent, sont affectées comme officiers ou militaires du rang aux Forces canadiennes ou détachées auprès de celles-ci;

(d) subject to such exceptions, adaptations and modifications as the Governor in Council may by regulations prescribe, a person who, pursuant to law or pursuant to an agreement between Canada and the state in whose armed forces the person is serving, is attached or seconded as an officer or non-commissioned member to the Canadian Forces;

e) les personnes qui, normalement non assujetties au code de discipline militaire, servent comme officiers ou militaires du rang dans toute force levée et entretenue à l’étranger par Sa Majesté du chef du Canada et commandée par un officier des Forces canadiennes;

(e) a person, not otherwise subject to the Code of Service Discipline, who is serving in the position of an officer or non-commissioned member of any force raised and maintained outside Canada by Her Majesty in right of Canada and commanded by an officer of the Canadian Forces;

f) les personnes qui, normalement non assujetties au code de discipline militaire, accompagnent quelque unité ou autre élément des Forces canadiennes en service, actif ou non, dans un lieu quelconque;

(f) a person, not otherwise subject to the Code of Service Discipline, who accompanies any unit or other element of the Canadian Forces that is on service or active service in any place;

g) sous réserve des exceptions, adaptations et modifications que le gouverneur en conseil peut prévoir par règlement, les personnes fréquentant un établissement créé aux termes de l’article 47;

(g) subject to such exceptions, adaptations and modifications as the Governor in Council may by regulations prescribe, a person attending an institution established under section 47;

h) les présumés espions pour le compte de l’ennemi;

(h) an alleged spy for the enemy;

i) les personnes qui, normalement non assujetties au code de discipline militaire, sont sous garde civile ou militaire pour quelque infraction d’ordre militaire qu’elles ont — ou auraient — commise;

(i) a person, not otherwise subject to the Code of Service Discipline, who, in respect of any service offence committed or alleged to have been committed by the person, is in civil custody or in service custody; and

j) les personnes qui, normalement non assujetties au code de discipline militaire, servent auprès des Forces canadiennes aux termes d’un engagement passé avec le ministre par lequel elles consentent à relever de ce code.

(j) a person, not otherwise subject to the Code of Service Discipline, while serving with the Canadian Forces under an engagement with the Minister whereby the person agreed to be subject to that Code.

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60(2) Quiconque était justiciable du code de discipline militaire au moment où il aurait commis une infraction d’ordre militaire peut être accusé, poursuivi et jugé pour cette infraction sous le régime du code de discipline militaire, même s’il a cessé, depuis que l’infraction a été commise, d’appartenir à l’une des catégories énumérées au paragraphe (1).

60(2) Every person subject to the Code of Service Discipline under subsection (1) at the time of the alleged commission by the person of a service offence continues to be liable to be charged, dealt with and tried in respect of that offence under the Code of Service Discipline notwithstanding that the person may have, since the commission of that offence, ceased to be a person described in subsection (1).

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61 (1) Pour l’application du présent article et des articles 60, 62 et 65 mais sous réserve des restrictions réglementaires, une personne accompagne une unité ou un autre élément des Forces canadiennes qui est en service, actif ou non, si, selon le cas :

61 (1) For the purposes of this section and sections 60, 62 and 65, but subject to any limitations prescribed by the Governor in Council, a person accompanies a unit or other element of the Canadian Forces that is on service or active service if the person

a) elle participe, avec cet élément ou unité, à l’une quelconque de ses actions : mouvements, manoeuvres, aide au pouvoir civil, assistance en cas de catastrophe ou opérations de combat;

(a) participates with that unit or other element in the carrying out of any of its movements, manoeuvres, duties in aid of the civil power, duties in a disaster or warlike operations;

b) elle est logée ou pourvue d’une ration — à ses propres frais ou non — par cet élément ou unité en tout pays ou en tout lieu désigné par le gouverneur en conseil;

(b) is accommodated or provided with rations at the person’s own expense or otherwise by that unit or other element in any country or at any place designated by the Governor in Council;

c) elle est à la charge, à l’étranger, d’un officier ou militaire du rang servant au-delà des limites du Canada avec cet élément ou unité;

(c) is a dependant outside Canada of an officer or non-commissioned member serving beyond Canada with that unit or other element; or

d) elle se trouve à bord d’un navire ou aéronef de cet élément ou unité.

(d) is embarked on a vessel or aircraft of that unit or other element.

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68 Quiconque est présumé avoir commis une infraction d’ordre militaire peut être accusé, poursuivi et jugé sous le régime du code de discipline militaire, tant au Canada qu’à l’étranger.

68 Every person alleged to have committed a service offence may be charged, dealt with and tried under the Code of Service Discipline, either in Canada or outside Canada.

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85 Quiconque menace ou insulte verbalement un supérieur, ou se conduit de façon méprisante à son endroit, commet une infraction et, sur déclaration de culpabilité, encourt comme peine maximale la destitution ignominieuse du service de Sa Majesté.

85 Every person who uses threatening or insulting language to, or behaves with contempt toward, a superior officer is guilty of an offence and on conviction is liable to dismissal with disgrace from Her Majesty’s service or to less punishment.

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95 Quiconque frappe ou de quelque autre façon maltraite un subordonné — par le grade ou l’emploi — commet une infraction et, sur déclaration de culpabilité, encourt comme peine maximale un emprisonnement de moins de deux ans.

95 Every person who strikes or otherwise ill-treats any person who by reason of rank or appointment is subordinate to him is guilty of an offence and on conviction is liable to imprisonment for less than two years or to less punishment.

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129 (1) Tout acte, comportement ou négligence préjudiciable au bon ordre et à la discipline constitue une infraction passible au maximum, sur déclaration de culpabilité, de destitution ignominieuse du service de Sa Majesté.

129 (1) Any act, conduct, disorder or neglect to the prejudice of good order and discipline is an offence and every person convicted thereof is liable to dismissal with disgrace from Her Majesty’s service or to less punishment.

(2) Est préjudiciable au bon ordre et à la discipline tout acte ou omission constituant une des infractions prévues à l’article 72, ou le fait de contrevenir à :

(2) An act or omission constituting an offence under section 72 or a contravention by any person of

a) une disposition de la présente loi;

(a) any of the provisions of this Act,

b) des règlements, ordres ou directives publiés pour la gouverne générale de tout ou partie des Forces canadiennes;

(b) any regulations, orders or instructions published for the general information and guidance of the Canadian Forces or any part thereof, or

c) des ordres généraux, de garnison, d’unité, de station, permanents, locaux ou autres.

(c) any general, garrison, unit, station, standing, local or other orders, is an act, conduct, disorder or neglect to the prejudice of good order and discipline.

(3) Est également préjudiciable au bon ordre et à la discipline la tentative de commettre l’une des infractions prévues aux articles 73 à 128.

(3) An attempt to commit any of the offences prescribed in sections 73 to 128 is an act, conduct, disorder or neglect to the prejudice of good order and discipline.

(4) Les paragraphes (2) et (3) n’ont pas pour effet de porter atteinte à l’application du paragraphe (1).

(4) Nothing in subsection (2) or (3) affects the generality of subsection (1).

(5) Le présent article ne peut être invoqué pour justifier une accusation relative à l’une des infractions expressément prévues aux articles 73 à 128; le fait que l’accusation contrevient au présent paragraphe ne suffit toutefois pas pour invalider la condamnation de la personne ainsi accusée, sauf si la contravention paraît avoir entraîné une injustice à son égard.

(5) No person may be charged under this section with any offence for which special provision is made in sections 73 to 128 but the conviction of a person so charged is not invalid by reason only of the charge being in contravention of this subsection unless it appears that an injustice has been done to the person charged by reason of the contravention.

(6) La validité de la condamnation ne porte pas atteinte à la responsabilité d’un officier en ce qui a trait à la contravention.

(6) The responsibility of any officer for the contravention of subsection (5) is not affected by the validity of any conviction on the charge in contravention of that subsection.

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162.1 Sauf dans les cas prévus par règlement du gouverneur en conseil, un accusé qui peut être jugé sommairement peut choisir d’être jugé devant une cour martiale.

162.1 Except in the circumstances prescribed in regulations made by the Governor in Council, an accused person who is triable by summary trial has the right to elect to be tried by court martial.

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165.21(3) Le juge militaire est nommé à titre inamovible, sous réserve de révocation motivée par le gouverneur en conseil sur recommandation du comité d’enquête sur les juges militaires.

165.21(3) A military judge holds office during good behaviour and may be removed by the Governor in Council for cause on the recommendation of the Military Judges Inquiry Committee.

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165.23(2) Ils exercent en outre toute autre fonction que leur confie le juge militaire en chef et qui n’est pas incompatible avec leurs fonctions judiciaires.

165.23(2) In addition to their judicial duties, military judges shall perform any other duties that the Chief Military Judge may direct, but those other duties may not be incompatible with their judicial duties.

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165.231 Les juges militaires bénéficient de la même immunité de poursuite que les juges d’une cour supérieure de juridiction criminelle.

165.231 A military judge has the same immunity from liability as a judge of a superior court of criminal jurisdiction.

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165.31 (1) Est constitué le comité d’enquête sur les juges militaires, formé de trois juges de la Cour d’appel de la cour martiale nommés par le juge en chef de ce tribunal.

165.31 (1) There is established a Military Judges Inquiry Committee to which the Chief Justice of the Court Martial Appeal Court shall appoint three judges of the Court Martial Appeal Court.

(2) Le juge en chef nomme un des juges à titre de président.

(2) The Chief Justice shall appoint one of the judges to act as Chairperson.

(3) Le comité d’enquête a, pour la comparution, la prestation de serment et l’interrogatoire des témoins, ainsi que pour la production et l’examen des pièces, l’exécution de ses ordonnances et toute autre question relevant de sa compétence, les mêmes attributions qu’une cour supérieure de juridiction criminelle, notamment le pouvoir de punir l’outrage au tribunal.

(3) The inquiry committee has the same powers, rights and privileges — including the power to punish for contempt — as are vested in a superior court of criminal jurisdiction with respect to

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(a) the attendance, swearing and examination of witnesses;

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(b) the production and inspection of documents;

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(c) the enforcement of its orders; and

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(d) all other matters necessary or proper for the due exercise of its jurisdiction.

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165.32 (1) Si le ministre lui en fait la demande par écrit, le comité d’enquête sur les juges militaires entreprend une enquête sur la question de savoir si un juge militaire doit être révoqué.

165.32 (1) The Military Judges Inquiry Committee shall, on receipt of a request in writing made by the Minister, commence an inquiry as to whether a military judge should be removed from office.

(2) Le comité peut enquêter sur toute plainte ou accusation relative à un juge militaire qui lui est transmise par écrit et qui porte sur la question de savoir si le juge militaire doit être révoqué.

(2) The inquiry committee may, on receipt of any complaint or allegation in writing made in respect of a military judge, commence an inquiry as to whether the military judge should be removed from office.

(3) Le président peut charger un des membres du comité d’examiner toute plainte ou accusation transmise au titre du paragraphe (2) et de recommander au comité de procéder ou non à l’enquête.

(3) The Chairperson of the inquiry committee may designate a judge appointed to the committee to examine a complaint or allegation referred to in subsection (2) and to recommend whether an inquiry should be commenced.

(4) Le juge militaire en cause doit être informé, suffisamment à l’avance, de l’objet de l’enquête, ainsi que des date, heure et lieu de l’audition, et avoir la possibilité de se faire entendre, de contre-interroger les témoins et de présenter tous éléments de preuve utiles à sa décharge, en personne ou par l’intermédiaire d’un avocat.

(4) The military judge in respect of whom an inquiry is held shall be given reasonable notice of the inquiry’s subject matter and of its time and place and shall be given an opportunity, in person or by counsel, to be heard at the inquiry, to cross-examine witnesses and to adduce evidence on his or her own behalf.

(5) Sauf ordre contraire du ministre fondé sur l’intérêt du public et des personnes prenant part à l’enquête, celle-ci peut se tenir à huis clos.

(5) The inquiry committee may hold an inquiry either in public or in private unless the Minister, having regard to the interests of the persons participating in the inquiry and the interests of the public, directs that the inquiry be held in public.

(6) Le président peut retenir, à titre temporaire, les services d’avocats pour assister le comité et, en conformité avec les instructions du Conseil du Trésor, définir leurs conditions d’emploi et fixer leur rémunération et leurs indemnités.

(6) The Chairperson of the inquiry committee may engage on a temporary basis the services of counsel to assist the committee and may, subject to any applicable Treasury Board directives, establish the terms and conditions of the counsel’s engagement and fix their remuneration and expenses.

(7) Le comité peut recommander au gouverneur en conseil de révoquer le juge militaire s’il est d’avis que celui-ci, selon le cas :

(7) The inquiry committee may recommend to the Governor in Council that the military judge be removed if, in its opinion,

a) est inapte à remplir ses fonctions judiciaires pour l’un ou l’autre des motifs suivants :

(a) the military judge has become incapacitated or disabled from the due execution of his or her judicial duties by reason of

(i) infirmité,

(i) infirmity,

(ii) manquement à l’honneur et à la dignité,

(ii) having been guilty of misconduct,

(iii) manquement aux devoirs de la charge de juge militaire,

(iii) having failed in the due execution of his or her judicial duties, or

(iv) situation d’incompatibilité, qu’elle soit imputable au juge militaire ou à toute autre cause;

(iv) having been placed, by his or her conduct or otherwise, in a position incompatible with the due execution of his or her judicial duties; or

b) ne possède pas les aptitudes physiques et l’état de santé exigés des officiers.

(b) the military judge does not satisfy the physical and medical fitness standards applicable to officers.

(8) Le comité transmet le rapport de ses conclusions et le dossier de l’enquête au ministre et, si l’enquête a été tenue en public, rend le rapport accessible au public.

(8) The inquiry committee shall provide to the Minister a record of each inquiry and a report of its conclusions. If the inquiry was held in public, the inquiry committee shall make its report available to the public.

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165.33 (1) Est constitué le comité d’examen de la rémunération des juges militaires, composé de trois membres à temps partiel nommés par le gouverneur en conseil sur le fondement des propositions suivantes :

165.33 (1) There is established a Military Judges Compensation Committee consisting of three part-time members to be appointed by the Governor in Council as follows:

a) un membre proposé par les juges militaires;

(a) one person nominated by the military judges;

b) un membre proposé par le ministre;

(b) one person nominated by the Minister; and

c) un membre proposé à titre de président par les membres nommés conformément aux alinéas a) et b).

(c) one person, who shall act as chairperson, nominated by the members who are nominated under paragraphs (a) and (b).

(2) Les membres sont nommés à titre inamovible pour un mandat de quatre ans, sous réserve de révocation motivée du gouverneur en conseil.

(2) Each member holds office during good behaviour for a term of four years, and may be removed for cause at any time by the Governor in Council.

(3) Leur mandat est renouvelable une fois.

(3) A member is eligible to be reappointed for one further term.

(4) En cas d’absence ou d’empêchement d’un membre, le gouverneur en conseil peut lui nommer un remplaçant suivant la procédure prévue au paragraphe (1).

(4) In the event of the absence or incapacity of a member, the Governor in Council may appoint, as a substitute temporary member, a person nominated in accordance with subsection (1).

(5) Le gouverneur en conseil comble toute vacance suivant la procédure prévue au paragraphe (1). Le mandat du nouveau membre prend fin à la date prévue pour la fin du mandat de l’ancien.

(5) If the office of a member becomes vacant during the member’s term, the Governor in Council shall appoint a person nominated in accordance with subsection (1) to hold office for the remainder of the term.

(6) Le quorum est de trois membres.

(6) All three members of the compensation committee together constitute a quorum.

(7) Les membres ont droit à la rémunération fixée par le gouverneur en conseil et sont indemnisés, en conformité avec les instructions du Conseil du Trésor, des frais de déplacement et de séjour entraînés par l’accomplissement de leurs fonctions hors de leur lieu habituel de résidence.

(7) The members of the compensation committee shall be paid the remuneration fixed by the Governor in Council and, subject to any applicable Treasury Board directives, the reasonable travel and living expenses incurred by them in the course of their duties while absent from their ordinary place of residence.

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179 (1) La cour martiale a, pour la comparution, la prestation de serment et l’interrogatoire des témoins, ainsi que pour la production et l’examen des pièces, l’exécution de ses ordonnances et toutes autres questions relevant de sa compétence, les mêmes attributions qu’une cour supérieure de juridiction criminelle, notamment le pouvoir de punir l’outrage au tribunal.

179 (1) A court martial has the same powers, rights and privileges — including the power to punish for contempt — as are vested in a superior court of criminal jurisdiction with respect to

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(a) the attendance, swearing and examination of witnesses;

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(b) the production and inspection of documents;

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(c) the enforcement of its orders; and

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(d) all other matters necessary or proper for the due exercise of its jurisdiction.

(2) Chaque juge militaire a ces mêmes attributions pour l’exercice des fonctions judiciaires que lui confie la présente loi, sauf lorsqu’il préside une cour martiale.

(2) Subsection (1) applies to a military judge performing a judicial duty under this Act other than presiding at a court martial.

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en blancEn blanc

203.1 (1) La détermination de la peine a pour objectifs essentiels de favoriser l’efficacité opérationnelle des Forces canadiennes en contribuant au maintien de la discipline, de la bonne organisation et du moral, et de contribuer au respect de la loi et au maintien d’une société juste, paisible et sûre.

203.1 (1) The fundamental purposes of sentencing are

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(a) to promote the operational effectiveness of the Canadian Forces by contributing to the maintenance of discipline, efficiency and morale; and

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(b) to contribute to respect for the law and the maintenance of a just, peaceful and safe society.

(2) L’atteinte de ces objectifs essentiels se fait par l’infliction de sanctions justes visant un ou plusieurs des objectifs suivants :

(2) The fundamental purposes shall be achieved by imposing just sanctions that have one or more of the following objectives:

a) renforcer le devoir d’obéissance aux ordres légitimes;

(a) to promote a habit of obedience to lawful commands and orders;

b) maintenir la confiance du public dans les Forces canadiennes en tant que force armée disciplinée;

(b) to maintain public trust in the Canadian Forces as a disciplined armed force;

c) dénoncer les comportements illégaux;

(c) to denounce unlawful conduct;

d) dissuader les contrevenants et autres personnes de commettre des infractions;

(d) to deter offenders and other persons from committing offences;

e) favoriser la réinsertion sociale des contrevenants;

(e) to assist in rehabilitating offenders;

f) favoriser la réinsertion des contrevenants dans la vie militaire;

(f) to assist in reintegrating offenders into military service;

g) isoler, au besoin, les contrevenants des autres officiers et militaires du rang ou de la société en général;

(g) to separate offenders, if necessary, from other officers or non-commissioned members or from society generally;

h) assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité;

(h) to provide reparations for harm done to victims or to the community; and

i) susciter le sens des responsabilités chez les contrevenants, notamment par la reconnaissance des dommages causés à la victime et à la collectivité.

(i) to promote a sense of responsibility in offenders, and an acknowledgment of the harm done to victims and to the community.

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230 Toute personne assujettie au code de discipline militaire peut, sous réserve du paragraphe 232(3), exercer un droit d’appel devant la Cour d’appel de la cour martiale en ce qui concerne les décisions suivantes d’une cour martiale :

230 Every person subject to the Code of Service Discipline has, subject to subsection 232(3), the right to appeal to the Court Martial Appeal Court from a court martial in respect of any of the following matters:

a) avec l’autorisation de la Cour d’appel ou de l’un de ses juges, la sévérité de la sentence, à moins que la sentence n’en soit une que détermine la loi;

(a) with leave of the Court or a judge thereof, the severity of the sentence, unless the sentence is one fixed by law;

a.1) la décision de rendre l’ordonnance visée au paragraphe 745.51(1) du Code criminel;

(a.1) the decision to make an order under subsection 745.51(1) of the Criminal Code;

b) la légalité de tout verdict de culpabilité;

(b) the legality of any finding of guilty;

c) la légalité de la sentence, dans son ensemble ou tel aspect particulier;

(c) the legality of the whole or any part of the sentence;

d) la légalité d’un verdict d’inaptitude à subir son procès ou de non-responsabilité pour cause de troubles mentaux;

(d) the legality of a finding of unfit to stand trial or not responsible on account of mental disorder;

e) la légalité d’une décision rendue aux termes de l’article 201, 202 ou 202.16;

(e) the legality of a disposition made under section 201, 202 or 202.16;

f) la légalité de la décision prévue à l’un des paragraphes 196.14(1) à (3);

(f) the legality of a decision made under any of subsections 196.14(1) to (3);

g) la légalité de la décision rendue en application du paragraphe 227.01(2);

(g) the legality of a decision made under subsection 227.01(2);

h) la légalité de toute ordonnance rendue au titre des articles 147.1 ou 226.2 ou, avec l’autorisation de la Cour d’appel ou de l’un de ses juges, le caractère raisonnable du délai imposé au titre de l’article 147.2;

(h) the legality of an order made under section 147.1 or 226.2 and, with leave of the Court or a judge of the Court, the reasonableness of any period imposed under section 147.2;

i) la légalité de toute ordonnance rendue au titre de l’article 148 ou la légalité de toute condition imposée au titre de cet article ou, avec l’autorisation de la Cour d’appel ou de l’un de ses juges, sa sévérité;

(i) the legality of an order made under section 148 and the legality or, with leave of the Court or a judge of the Court, the severity of any condition imposed under that section;

j) la légalité de toute ordonnance de dédommagement rendue au titre de l’article 203.9 ou, avec l’autorisation de la Cour d’appel ou de l’un de ses juges, sa sévérité, ou la légalité de toute ordonnance de restitution rendue au titre de l’article 249.25;

(j) the legality or, with leave of the Court or a judge of the Court, the severity of a restitution order made under section 203.9 or the legality of an order made under section 249.25; or

k) la légalité de toute suspension d’une peine d’emprisonnement ou de détention ou la légalité de toute condition imposée au titre du paragraphe 215(3) ou, avec l’autorisation de la Cour d’appel ou de l’un de ses juges, sa sévérité.

(k) the legality of a suspension of a sentence of imprisonment or detention and the legality or, with leave of the Court or a judge of the Court, the severity of any condition imposed under subsection 215(3).

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235 (1) La Cour d’appel de la cour martiale peut siéger et entendre les appels en tout lieu; son juge en chef prend les dispositions nécessaires pour la tenue de ses séances et audiences.

235 (1) The Court Martial Appeal Court may sit and hear appeals at any place or places, and the Chief Justice of the Court shall arrange for sittings and hearings as may be required.

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245 (1) Toute personne assujettie au code de discipline militaire peut interjeter appel à la Cour suprême du Canada d’une décision de la Cour d’appel de la cour martiale sur toute question de droit, dans l’une ou l’autre des situations suivantes :

245 (1) A person subject to the Code of Service Discipline may appeal to the Supreme Court of Canada against a decision of the Court Martial Appeal Court

a) un juge de la Cour d’appel de la cour martiale exprime son désaccord à cet égard;

(a) on any question of law on which a judge of the Court Martial Appeal Court dissents; or

b) l’autorisation d’appel est accordée par la Cour suprême.

(b) on any question of law, if leave to appeal is granted by the Supreme Court of Canada.

Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes

Queen’s Regulations and Orders for the Canadian Armed Forces

19.75(1) Le présent article ne s'applique pas aux officiers et militaires du rang assujettis à l'article 101.09 (Retrait des fonctions militaires – avant et après le procès), aux juges militaires, au grand prévôt, au directeur des poursuites militaires ni au directeur du service d'avocats de la défense.

19.75(1) This article does not apply to an officer or non-commissioned member to whom article 101.09 (Relief from Performance of Military Duty – Pre and Post Trial) applies, nor to a military judge, the Provost Marshal, the Director of Military Prosecutions or the Director of Defence Counsel Services.

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26.10 - RAPPORTS ET APPRÉCIATIONS PERSONNELS – EXCEPTIONS

26.10 - PERSONAL REPORTS AND ASSESSMENTS – EXCEPTIONS

Aucun rapport ou appréciation personnels ni autre document ne doit être rempli à l’égard d’un juge militaire, du directeur des poursuites militaires ou du directeur du service d’avocats de la défense pour la période au cours de laquelle celui-ci exerce ses fonctions s’il sert en tout ou en partie à décider si l’officier a les qualifications pour être promu ou à prévoir la formation, l’affectation ou le taux de solde de l’officier.

No personal report, assessment or other document shall be completed in respect of a military judge, the Director of Military Prosecutions or the Director of Defence Counsel Services for the period during which they performed their duties if such a document is to be used in whole or in part to determine the training, posting or rate of pay of the officer, or whether the officer is qualified to be promoted.

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20.04 - INTERDICTION

20.04 - PROHIBITION

Il est interdit à un officier ou à un militaire du rang de faire usage de toute drogue, sauf dans les cas suivants :

No officer or non-commissioned member shall use any drug unless:

un médecin ou dentiste qualifié a autorisé le militaire à faire usage d'une drogue à des fins de traitements médicaux ou de soins dentaires;

the member is authorized to use the drug by a qualified medical or dental practitioner for the purposes of medical treatment or dental care;

la drogue fait partie intégrante d'un médicament disponible sans ordonnance dont le militaire fait usage en conformité avec les instructions du médicament;

the drug is contained in a non-prescription medication used by the member in accordance with the instructions accompanying the medication; or

 

le militaire est tenu de faire usage d'une drogue dans l'accomplissement de ses tâches militaires.

the member is required to use the drug in the course of military duties.

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26.12 - DOSSIER RELATIF AUX RAPPORTS D’APPRÉCIATION DU PERSONNEL – EXCEPTIONS

26.12 - PERSONNEL EVALUATION REPORT FILE – EXCEPTIONS

Le dossier relatif aux rapports d’appréciation du personnel d’un officier qui est juge militaire, directeur des poursuites militaires ou directeur du service d’avocats de la défense ne doit pas être déposé devant un conseil de promotion au mérite.

The personnel evaluation report file of an officer who is a military judge, the Director of Military Prosecutions or the Director of Defence Counsel Services shall not be placed before a promotion board.

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108.45 – RÉVISION DU VERDICT OU DE LA PEINE D'UN PROCÈS SOMMAIRE

108.45 – REVIEW OF FINDING OR PUNISHMENT OF SUMMARY TRIAL

(1) Un officier ou militaire du rang qui a été reconnu coupable d'une infraction d'ordre militaire à un procès sommaire peut demander à l'autorité de révision :

(1) An officer or non-commissioned member found guilty of a service offence at a summary trial may request a review authority to:

a) d'annuler le verdict de culpabilité en raison de son caractère injuste;

(a) set aside the finding of guilty on the ground that it is unjust; and

b) de modifier la sentence en raison de son caractère injuste ou trop sévère.

(b) alter the sentence on the ground that it is unjust or too severe.

(2) Pour l'application du présent article :

(2) For the purposes of this article:

a) l'autorité de révision d'un procès sommaire présidé par un officier délégué est le commandant de l'unité;

(a) the review authority for a summary trial by delegated officer is the commanding officer of the unit;

b) l'autorité de révision d'un procès sommaire présidé par un commandant est l'officier immédiatement supérieur envers qui le commandant de l'unité est responsable pour les questions de discipline;

(b) the review authority for a summary trial by a commanding officer is the next superior officer to whom the commanding officer of the unit is responsible in matters of discipline; and

c) l'autorité de révision d'un procès sommaire présidé par un commandant supérieur est l'officier immédiatement supérieur envers qui le commandant supérieur est responsable pour les questions de discipline.

(c) the review authority for a summary trial by a superior commander is the next superior officer to whom the superior commander is responsible in matters of discipline.

(3) Si l’officier visé par l’alinéa (2) estime qu’il ne convient pas, dans l’intérêt de la justice militaire et de la discipline, qu’il agisse comme autorité de révision dans un cas donné, l’officier doit :

(3) Where an officer referred to in paragraph (2) is of the opinion that it would be inappropriate for him to act as a review authority in a particular case, having regard to the interests of military justice and discipline, the officer shall:

a) s’abstenir de décider du bien-fondé de la demande de révision;

(a) not make any determination in respect of the request for review; and

b) renvoyer la demande de révision à l'officier immédiatement supérieur envers qui l'officier est responsable pour les questions de discipline.

(b) refer the request for review to the next superior officer to whom he is responsible in matters of discipline.

(4) Une demande de révision est présentée par écrit. Elle énonce les faits pertinents et les motifs démontrant le caractère injuste du verdict ou le caractère injuste ou trop sévère de la peine.

(4) A request for review must be made in writing and state the relevant facts and the reasons why a finding is unjust or a punishment is unjust or too severe.

(5) Dans les 14 jours suivant la fin du procès sommaire, une demande de révision doit être remise à l'autorité de révision et une copie de celle-ci doit être remise à l'officier qui a présidé le procès sommaire.

(5) A request for review must be delivered to the review authority, and a copy delivered to the officer who presided at the summary trial, within 14 days of the termination of the summary trial.

(6) Dans les sept jours suivant la réception d'une copie de la demande de révision, l'officier qui a présidé le procès sommaire remet ses commentaires touchant la demande à l'autorité de révision et en remet une copie au militaire qui a présenté la demande.

(6) Within seven days of receiving a copy of a request for review, the officer who presided at the summary trial shall deliver his or her comments concerning the request to the review authority and a copy to the member who requested the review.

(7) L'officier ou le militaire du rang qui a présenté une demande de révision peut remettre des représentations additionnelles à l'autorité de révision dans les sept jours suivant la réception d'une copie des commentaires de l'officier qui a présidé le procès sommaire.

(7) An officer or non-commissioned member requesting a review may deliver further representations to the review authority within seven days of receiving a copy of the comments of the officer who presided at the summary trial.

(8) Avant de décider du bien-fondé de la demande de révision, l'autorité de révision doit obtenir une opinion juridique.

(8) Before making a determination in respect of the request for review, a review authority shall obtain legal advice.

(9) Un avocat militaire qui a donné une opinion juridique relativement au dépôt d'une accusation ou à toute procédure sommaire reliée à l'accusation ne doit pas donner d'opinion juridique à l'autorité de révision en rapport avec cette affaire.

(9) A legal officer who provided advice in respect of the laying of a charge or any summary proceedings relating to the charge shall not provide legal advice to the review authority in relation to that case.

(10) Dans les 21 jours suivant la réception d'une demande de révision, l'autorité de révision révise le procès sommaire et décide si le verdict doit être annulé ou si toute peine infligée doit être modifiée.

(10) Within 21 days after receiving a request for review, the review authority shall review the summary trial and determine whether to set aside any finding made or alter any punishment imposed.

(11) S'il est impossible à l'autorité de révision de prendre une décision en conformité avec l'alinéa (10) parce qu'elle a besoin de renseignements supplémentaires, elle doit à la fois :

(11) If a review authority is unable to make a determination under paragraph (10) because further information is required, the review authority shall:

a) les obtenir;

(a) seek the necessary information;

b) aviser le militaire qui a présenté la demande de révision, qu'une demande de renseignements supplémentaires a été faite;

(b) notify the member requesting the review that further information has been sought; and

c) fournir au militaire une copie de tout renseignement qui a été obtenu.

(c) provide the member requesting the review with a copy of any information subsequently obtained.

(12) L’officier ou le militaire du rang qui a présenté une demande de révision peut remettre des représentations additionnelles à l’autorité de révision dans les sept jours suivant la réception d’une copie des renseignements visés par l’alinéa (11).

(12) An officer or non-commissioned member requesting a review may deliver further representations to the review authority within seven days of receiving a copy of the information referred to at paragraph (11).

(13) Si des renseignements supplémentaires sont requis en application de l’alinéa (11), l’autorité de révision doit, dans les 35 jours suivant la réception de la demande de révision, réviser le procès sommaire et décider si tout verdict doit être annulé ou si la sentence doit être modifiée.

(13) If additional information is sought under paragraph (11), the review authority shall, within 35 days after receiving the request for review, review the summary trial and determine whether to set aside any finding made or alter any punishement imposed.

(14) Dès que possible après avoir pris sa décision, l'autorité de révision prend les mesures suivantes :

(14) As soon as practicable after the review authority has made a decision, the review authority shall:

a) elle fait aviser par écrit de la décision l'officier ou le militaire du rang qui a présenté la demande, l'officier qui a présidé le procès sommaire et, lorsque l'autorité de révision n'est pas le commandant du militaire, son commandant;

(a) cause the officer or non-commissioned member making the request, the presiding officer and, where the review authority is not the member's commanding officer, the member's commanding officer to be notified in writing of the decision;

b) elle se conforme à l'alinéa (6) de l'article 107.14 (Tenue d'un fichier des poursuites disciplinaires de l'unité);

(b) comply with paragraph (6) of article 107.14 (Maintenance of Unit Registry of Disciplinary Proceedings); and

c) elle fait consigner les inscriptions indiquées à la partie 7 du procès-verbal de procédure disciplinaire.

(c) cause the appropriate entries to be made to Part 7 of the original Record of Disciplinary Proceedings.

(15) Lorsque le commandant de l'officier ou du militaire du rang reçoit avis écrit de la décision de l'autorité de révision, il doit :

(15) When the officer or non-commissioned member's commanding officer receives written notification of a review authority's decision, the commanding officer shall:

a) d'une part, faire consigner les inscriptions indiquées au dossier militaire de l'officier ou du militaire du rang, notamment à sa fiche de conduite (voir DOAD 7006-0, Fiches de conduite) lorsque le verdict ou la sentence ont été modifiés;

(a) cause the appropriate entries to be made to the service records of the member, including the conduct sheet in any case where the finding or sentence has been altered (see DAOD 7006-0, Conduct Sheets); and

b) d'autre part, prendre toutes les mesures nécessaires pour la mise en œuvre de la décision.

(b) take any other action necessary to give effect to the decision.

(16) L’autorité de révision peut, dans l’intérêt de la justice militaire, proroger le délai alloué pour faire une demande de révision, selon ce qu’elle estime être raisonnable dans les circonstances.

(16) A review authority may, in the interests of military justice, extend the period for making a request for review to such period as that authority considers reasonable in the circumstances.

(17) Si la demande de révision est présentée par un militaire du rang à qui une peine de détention a été infligée, le commandant de ce dernier, en application du paragraphe 216(4) de la Loi sur la défense nationale et sans délai après avoir reçu la demande ou avoir vérifié qu’une demande a été faite, suspend la peine de détention jusqu’à ce que la révision soit terminée (voir l’article 113.34 – Désignation des autorités sursoyantes).

(17) In the case of a request for review by a non-commissioned member who has been sentenced to detention, the member’s commanding officer shall, without delay after receiving the request or verifying that it has been made, suspend the punishment of detention under subsection 216(4) of the National Defence Act until the review is completed (see article 113.34 – Prescribed Suspending Authorities).

(17.1) Si, une fois la révision terminée, il subsiste une peine de détention à purger, le militaire du rang est mis sous garde immédiatement ou aux moments indiqués, le cas échéant, dans l’ordonnance rendue au titre du paragraphe 148(1) de la Loi sur la défense nationale, dans la mesure où l’ordonnance demeure applicable.

(17.1) If, following the review, there is a punishment of detention that remains to be served, the non-commissioned member shall be taken into custody immediately or at the times specified in any order made under subsection 148(1) of the National Defence Act, to the extent the order remains applicable.

(18) Si l’officier ou le militaire du rang qui a présenté une demande de révision le requiert, le commandant désigne un officier ou militaire du rang d’un grade supérieur à celui de sergent pour aider le militaire à formuler sa demande et devrait, si cela est raisonnable dans les circonstances, désigner l’officier ou le militaire du rang choisi par le demandeur.

(18) If requested by an officer or non-commissioned member requesting a review, the commanding officer shall appoint an officer or non-commissioned member above the rank of sergeant to assist in the preparation of a request for review and should, where practical, appoint any officer or non-commissioned member requested by the applicant.

Loi sur les mesures spéciales d’importation L.R.C. (1985), ch. S-15

Special Import Measures Act, R.S.C., 1985, c. S-15

77.013 (2) Les juges ainsi que les anciens juges des juridictions supérieures canadiennes peuvent faire partie d’un groupe spécial.

77.013(2) Judges of any superior court in Canada and persons who are retired judges of any superior court in Canada are eligible to be appointed to a panel.

Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, L.C. 2005, ch. 46

Public Servants Disclosure Protection Act, S.C. 2005, c. 46

20.7 (1) Est constitué le Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, composé d’un président et de deux à six autres membres nommés par le gouverneur en conseil. Les membres sont des juges de la Cour fédérale ou d’une cour supérieure d’une province.

20.7 (1) There is established a tribunal to be known as the Public Servants Disclosure Protection Tribunal consisting of a Chairperson and not less than two and not more than six other members to be appointed by the Governor in Council. All of the members must be judges of the Federal Court or a superior court of a province.


COUR D’APPEL DE LA COUR MARTIALE DU CANADA

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

CMAC-606

 

 

INTITULÉ :

SA MAJESTÉ LA REINE c. MATELOT DE PREMIÈRE CLASSE C.D. EDWARDS

 

 

ET DOSSIER :

CMAC-607

 

 

INTITULÉ :

SA MAJESTÉ LA REINE c. CAPITAINE C.M.C. CRÉPEAU

 

 

ET DOSSIER :

CMAC-608

 

 

INTITULÉ :

SA MAJESTÉ LA REINE c. ARTILLEUR K. FONTAINE

 

 

ET DOSSIER :

CMAC-609

 

INTITULÉ :

SA MAJESTÉ LA REINE c. CAPITAINE M.J. IREDALE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

29 janvier 2021

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

juge en chef BELL

juge RENNIE

juge PARDU

 

DATE :

11 Juin 2021

 

COMPARUTIONS

Lieutenant-colonel Dylan Kerr

Major Stephan Poitras

 

pour l’appelante

 

Commandant Mark Létourneau

Capitaine Carlos Da Cruz

 

pour les intimés

MATELOT DE PREMIÈRE CLASSE C.D. EDWARDS ET CAPITAINE M.J. IREDALE

Capitaine de corvette Éric Léveillé

pour les intimés CAPitaine C.M.C. CRÉPEAU et artilleur K. FONTAINE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Service canadien des poursuites militaires

Ottawa (Ontario)

pour l’appelante

 

Service des avocats de la défense

Gatineau (Québec)

 

pour les intimés

 

 

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