Cour d'appel de la cour martiale

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Date : 20190218

 


Dossier : CMAC-596

Référence : 2019 CACM 1

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :  LE JUGE EN CHEF BELL

ENTRE :

CAPORAL-CHEF C. J. STILLMAN

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue par téléconférence à Halifax (Nouvelle-Écosse), le 14 février 2019.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 18 février 2019.

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE EN CHEF BELL

 


Date : 20190218

 


Dossier : CMAC-596

Référence : 2019 CACM 1

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :  LE JUGE EN CHEF BELL

ENTRE :

CAPORAL-CHEF C. J. STILLMAN

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

ORDONNANCE ET MOTIFS

LE JUGE EN CHEF BELL

[1]  Le 23 octobre 2013, une cour martiale permanente a déclaré le Caporal-chef C. J. Stillman [l’appelant] coupable d’infractions prévues à l’alinéa 130(1)a) de la Loi sur la défense nationale, L.R.C. (1985), ch. N-5 [LDN], liées à la décharge d’une arme à feu avec une intention particulière contraire à l’article 244 du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46 [Code], à la décharge d’une arme à feu avec insouciance en contravention à l’article 244.2 du Code, à des voies de fait graves en contravention à l’article 268 du Code, ainsi qu’à des infractions prévues à l’article 85 et à l’article 95 du Code. Au procès et devant la présente Cour, l’appelant a soutenu que l’alinéa 130(1)a) de la LDN qui prévoit un procès par ses pairs des Forces armées canadiennes plutôt qu’un procès devant jury est inconstitutionnel. La cour a rejeté l’argument de l’appelant selon lequel l’alinéa 130(1)a) de la LDN soit inconstitutionnel et elle a confirmé les déclarations de culpabilité et la peine (R. c. Déry, 2017 CACM 2 [Déry]). Pour arriver à sa conclusion dans l’affaire Déry, la Cour a suivi la décision qu’elle a rendue dans l’affaire R. c. Royes, 2016 CACM 1, 486 N.R. 257 [Royes]. Le 20 juin 2017, l’appelant a déposé un avis d’appel auprès de la Cour suprême du Canada. L’appel doit être entendu le 26 mars 2019. Compte tenu des décisions de la Cour dans les affaires Royes et Déry, une formation différemment constituée dans l’affaire R. c. Beaudry, 2018 CMAC 4 [Beaudry] a statué que l’alinéa 130(1)a) de la LDN est en effet inconstitutionnel en ce qu’il porte atteinte au droit à un procès devant jury établi à l’alinéa 11f) de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11. Le 15 janvier 2019, la Cour suprême du Canada a rejeté la demande du directeur des poursuites militaires de surseoir à l’exécution de la décision de la Cour dans l’affaire Beaudry en attendant qu’une décision définitive soit rendue par la Cour suprême dans cette affaire (R. c. Beaudry, 2019 CSC 2).

[2]  C’est dans ce contexte jurisprudentiel flou que l’appelant sollicite maintenant sa mise en liberté en attendant qu’une décision définitive sur son appel soit rendue par la Cour suprême du Canada. L’appelant se fonde, en partie, sur l’article 248.2 de la LDN en appui de sa requête de mise en liberté provisoire par voie judiciaire. 

[3]  Pour les motifs exposés dans l’affaire R. c. Royes, 2016 CACM 3, la présente Cour a conclu qu’elle n’a pas compétence pour ordonner la mise en liberté provisoire par voie judiciaire d’une personne déclarée coupable en attendant l’issue de son appel devant la Cour suprême du Canada. La LDN ne contient aucune disposition équivalente à l’alinéa 679(1)c) du Code criminel qui autorise explicitement les cours d’appel provinciales et territoriales à ordonner la mise en liberté provisoire par voie judiciaire en attendant l’issue de tels appels. La compétence de la Cour pour intervenir dans de telles circonstances passe par l’application des dispositions relatives au sursis que prévoit le paragraphe 65.1(1) de la Loi sur la Cour suprême, L.R.C. (1985), ch. S-26. Il se lit comme suit :  

Sursis d’exécution – Demande d’autorisation d’appel

 (1) La Cour, la juridiction inférieure ou un de leurs juges peut, à la demande de la partie qui a signifié et déposé l’avis de la demande d’autorisation d’appel, ordonner, aux conditions jugées appropriées, le sursis d’exécution du jugement objet de la demande.

[4]  Pour décider s’il y a lieu d’accorder un sursis, notre Cour doit prendre en compte l’examen à trois volets énoncé dans l’arrêt Manitoba (P.G.) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110, 38 D.L.R. (4th) 321 et l’arrêt RJR-Macdonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, 111 D.L.R. (4th) 385. La présente Cour doit être convaincue qu’il existe une question sérieuse à trancher, que l’appelant subira un préjudice irréparable si le sursis n’est pas accordé et que la prépondérance des inconvénients milite en faveur de l’octroi du sursis.

[5]  Je n’ai aucune hésitation à conclure qu’il y a une question sérieuse à trancher. L’incertitude entourant la constitutionnalité de l’alinéa 130(1)a) de la LDN soulève une question sérieuse qui sera bientôt tranchée par la Cour suprême du Canada.

[6]  Le consentement des parties facilite mon analyse de la question du préjudice irréparable et de celle de la prépondérance des inconvénients. Les deux parties reconnaissent qu’un sursis complet à l’exécution de la peine imposée, surtout en ce qui a trait au redressement accessoire ordonné par le juge militaire, pourrait donner lieu à un désaccord sur les questions du préjudice irréparable et de la prépondérance des inconvénients. Les parties ont donc consenti à un sursis de l’exécution de la peine imposée à certaines conditions, notamment que l’appelant soit mis en liberté; qu’il ne trouble pas l’ordre public et qu’il ait une bonne conduite; qu’il s’abstienne de communiquer avec les victimes Bombardier Trimm et Bombardier Coté; qu’il réside à 10221, 86th Street, Grande Prairie (Alberta) T8X O5B, avec l’obligation d’informer par écrit la police militaire, dans les 24 heures de tout changement anticipé de son lieu de résidence avec tous les détails de la nouvelle adresse; et qu’il se présente pour être placé en détention sur l’ordre de la présente Cour, de la Cour suprême du Canada ou des autorités d’incarcération des Forces armées canadiennes. Je considère que ces conditions sont acceptables.

[7]  Il y aura une ordonnance de sursis partiel de la peine imposée, comprenant la mise en liberté de l’appelant assujettie aux conditions énoncées ci-dessus.

  LA COUR ORDONNE un sursis partiel de la peine imposée au Caporal-chef C. J. Stillman par le juge militaire le 24 octobre 2013 aux conditions suivantes :

  • a) que l’appelant soit mis en liberté;

  • b) qu’il ne trouble pas l’ordre public et qu’il ait une bonne conduite;

  • c) qu’il s’abstienne de communiquer avec les victimes Bombardier Trimm et Bombardier Coté;

  • d) qu’il réside à 10221, 86th Street, Grande Prairie (Alberta) T8X O5B, avec l’obligation d’informer par écrit la police militaire, dans les 24 heures de tout changement anticipé de son lieu de résidence avec tous les détails de la nouvelle adresse;

  • e) qu’il se présente pour être placé en détention sur l’ordre de la présente Cour, de la Cour suprême du Canada ou des autorités d’incarcération des Forces armées canadiennes;

Sauf ce qui est énoncé dans les présentes, aucune autre partie de la peine n’est suspendue.

« B. Richard Bell »

Le juge en chef

 


COUR D’APPEL DE LA COUR MARTIALE DU CANADA

NOMS DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

CMAC-596

 

 

INTITULÉ :

CAPORAL-CHEF C. J. STILLMAN c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Halifax (NoUVELLE-ÉCOSSE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 FÉVRIER 2019

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE EN CHEF BELL

 

DATE DE L’ORDONNANCE ET DES MOTIFS :

LE 18 FÉVRIER 2019

 

COMPARUTIONS :

Lieutenant commandant Éric Léveillé

POUR L’APPELANT

 

Major Dominic Martin

pour l’intimée

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Service des avocats de la défense

Ottawa (Ontario)

 

POUR L’APPELANT

Service canadien des poursuites militaires

Ottawa (Ontario)

 

POUR L’INTIMÉE

 

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