Cour d'appel de la cour martiale

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Date : 20180509


Dossier : CMAC‑590

Référence : 2018 CACM 2

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE EN CHEF BELL

LE JUGE WATT

LE JUGE SCANLAN

 

 

ENTRE :

EX‑CAPORAL‑CHEF N.S. EDMUNDS

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue à Vancouver (Colombie‑Britannique), le 19 mars 2018.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 9 mai 2018.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA COUR

 


Date : 20180509


Dossier : CMAC‑590

Référence : 2018 CACM 2

CORAM :

LE JUGE EN CHEF BELL

LE JUGE WATT

LE JUGE SCANLAN

 

 

ENTRE :

EX‑CAPORAL‑CHEF N.S. EDMUNDS

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

[1]  Le 25 janvier 2017, l’appelant a été déclaré coupable, par une cour martiale générale, sous le régime de l’alinéa 130(1)a) de la Loi sur la défense nationale, L.R.C. 1985 ch. N‑5 [LDN], de quatre chefs de fraude, une infraction prévue à l’article 380 du Code criminel, L.R.C. C‑46 [Code criminel]. À la suite de la déclaration de culpabilité, le juge militaire a infligé une peine d’emprisonnement de 30 jours. Le juge militaire a ordonné la libération de l’appelant en attente de l’audience dans le présent appel.

[2]  L’appelant soutient que les déclarations de culpabilité sont nulles et non avenues vu que la personne qui a porté les accusations n’avait pas de croyance raisonnable que les infractions avaient été commises au moment où elle (la personne qui a porté les accusations) a signé le procès-verbal de procédure disciplinaire [PVPD]. Le PVPD est l’équivalent en droit militaire d’une dénonciation en droit pénal. L’intimée reconnaît que la personne qui a porté les accusations n’avait pas la croyance raisonnable requise, qu’il devrait être fait droit à l’appel et que les déclarations de culpabilité devraient être annulées. Nous sommes d’accord.

[3]  Même si la LDN ne prévoit aucune disposition identique à l’article 504 du Code criminel, qui exige que le dénonciateur ait des motifs raisonnables et probables de croire qu’un accusé a commis une infraction, l’article 107.02 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes [ORFC] et la note qui y est assortie prévoient une exigence semblable. Ces dispositions sont ainsi rédigées :

107.02 – POUVOIR DE PORTER DES ACCUSATIONS

107.02 – AUTHORITY TO LAY CHARGES

Les personnes suivantes peuvent porter des accusations sous le régime du code de discipline militaire :

The following persons may lay charges under the Code of Service Discipline:

  a. un commandant;

  a. a commanding officer;

  b. un officier ou militaire du rang autorisé par un commandant à porter des accusations;

  b. an officer or non‑commissioned member authorized by a commanding officer to lay charges; and

  c. un policier militaire à qui on a assigné une fonction d’enquêteur au sein du Service national d’enquêtes des Forces canadiennes.

  c. a member of the military police assigned to investigative duties with the Canadian Forces National Investigation Service.

NOTE

NOTE

La personne qui porte une accusation doit croire que l’accusé a commis l’infraction en question et la croyance sur laquelle elle s’appuie doit être raisonnable. L’expression « croyance raisonnable » fait référence à la croyance qui amènerait une personne ordinairement prudente à conclure que l’accusé est probablement coupable de l’infraction reprochée.

There must be an actual belief on the part of the person laying a charge that the accused has committed the alleged offence and that belief must be reasonable. A “reasonable belief” is a belief which would lead any ordinary prudent and cautious person to the conclusion that the accused is probably guilty of the offence alleged.

[4]  Comme en droit pénal, l’exigence que la personne qui porte des accusations ait des motifs raisonnables de croire que l’accusé a commis l’infraction reprochée constitue une protection contre le dépôt irresponsable d’accusations (R. c. Peavoy, [1974] O.J. no 103, (1974) 15 C.C.C. (2e) 97 (H.C. Ont.). Voir également R. c. Delalla, 2015 BCSC 592, [2015] B.C.J. n702 [Delalla] aux paras. 60 à 63; R. c. Edge, 2004 ABPC 55, 21 CR (6e) 361 aux paras. 23 à 25). Le défaut de respecter cette exigence relative à une croyance raisonnable porte un coup fatal au PVPD et entraîne une perte de compétence (R. c. Awad, 2015 NSCA 10, [2015] N.S.J. no 34; Delalla; R. c. Pilcher, [1981] M.J. no 552, (1981) 58 C.C.C. (2e) 435 (Cour prov. du Man.)). Lorsqu’une perte de compétence survient, la mise en accusation subséquente par le directeur des poursuites militaires ne saurait ressusciter le PVPD (R. c. Laity, 2007 CM 3011 au par. 30).

[5]  Dans ses observations écrites, l’appelant a également demandé un sursis d’instance en raison de la supposée inconduite de la Couronne et de la présumée violation de son droit à un procès dans un délai raisonnable. À l’appui de cette dernière prétention, il invoque l’alinéa 11b) de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.‑U.), 1982, ch. 11 [Charte] et la décision rendue dans l’arrêt R. c. Jordan, 2016 CSC 27, [2016] 1 R.C.S. 631. Au début de l’audience dans le présent appel, l’appelant a reconnu que, si le procès était frappé de nullité, il n’existerait aucune instance dûment intentée à l’égard de laquelle un sursis pourrait être accordé pour l’un ou l’autre motif invoqué. Nous sommes d’accord. L’instance et les déclarations de culpabilité sont frappées de nullité, la personne qui a porté les accusations n’ayant pas la croyance raisonnable nécessaire. Nous faisons droit à l’appel et annulons les déclarations de culpabilité. Dans les circonstances, faute de juridiction, nous ne pouvons accéder à la demande de sursis présentée par l’appelant.

« B. Richard Bell »

Juge en chef

« David Watt »

j.c.a.

« J. Edward Scanlan »

j.c.a.

 


COUR D’APPEL DE LA COUR MARTIALE DU CANADA

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

CMAC‑590

 

 

INTITULÉ :

D77 987 837 EX‑CAPORAL‑CHEF N.S. EDMUNDS c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

VANCOUVER (COLOMBIE‑BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 MARS 2018

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE EN CHEF BELL ET LES JUGES WATT ET SCANLAN

 

MOTIFS RENDUS À L’AUDIENCE :

LA COUR

DATE DES MOTIFS :

LE 9 mai 2018

 

COMPARUTIONS :

Lieutenant‑Colonel Denis Bernsten

 

POUR L’APPELANT

Major Dylan Kerr

POUR L’INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Service d’avocats de la Défense

Sidney (Colombie‑Britannique)

POUR L’APPELANT

 

 

Service canadien des poursuites militaires

Ottawa (Ontario)

POUR L’INTIMÉE

 

 

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